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William Marx
Littératures comparées
Collège de France
Année 2023-2024
09 - Comment lire ? La contre-société des lecteurs
Résumé
Toute théorie de l'interprétation doit partir de l'expérience naïve et empirique : ce que le critique américain Michael Warner appelle uncritical reading, la lecture non critique et non professionnelle du lecteur standard. Il faut partir de l'attachement aux livres, qui justifie qu'on aie envie de lire. L'étude de la littérature a ceci en effet de particulier qu'elle se fonde sur un plaisir sensible.
Or, les plaisirs et les intérêts de la lecture sont multiples et hétérogènes. Ils vont dans tous les sens. Dans le régime moderne de la littérature, l'autonomie de la lecture fait de celle-ci une occupation fondamentalement solitaire et asociale. Chacun y suit son bon plaisir. Pascal Quignard parle d'une « "société inassociée" des lecteurs ».
La force d'individuation de la lecture est telle qu'elle est capable de provoquer une dissociation à l'intérieur de la personne, l'épreuve de cette dissociation étant la relecture : le texte lu dans l'enfance provoque à l'âge adulte des émotions et des jugements différents. Montaigne et Proust témoignent, chacun à sa manière, de l'incommensurabilité entre la valeur d'un texte et le plaisir qu'il donne. En tant qu'expérience du sensible, le livre se fait le révélateur de la pluralité des moi et du passage du temps.
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William Marx
Littératures comparées
Collège de France
Année 2023-2024
08 - Comment lire ? - Le sourire lointain des livres
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William Marx
Littératures comparées
Collège de France
Année 2023-2024
Conférence - Masanori Tsukamoto : Les recherches sur le rêve chez Valéry, Proust et Myōe
Intervenant(s) :
Masanori Tsukamoto
Professeur à l'Institut des sciences humaines et sociales, université de Tokyo
Résumé
Lorsque les Cahiers de Valéry (1957-1961) ont été publiés bien après sa mort, on s'était étonné d'y trouver de nombreuses notes sur le rêve. Les allusions aux rêves, fragmentaires et sporadiques dans son œuvre, semblaient suggérer que l'écrivain avait adopté une attitude plutôt froide à l'égard de ce phénomène et avait même délibérément évité d'y réfléchir. Les notes volumineuses sur le rêve, pleines de développements contradictoires mais dotées d'une persistance inusitée, ont révélé que Valéry était en fait non seulement un explorateur de la théorie des rêves, mais aussi un poète qui cherchait à intégrer la puissance des rêves dans sa poétique. En lisant ses analyses sur le rêve, nous nous rendons compte que dans la première moitié du XXe siècle, il y avait une recherche sur le sommeil et le rêve très différente de celle de Freud. On le constate surtout lorsque l'on compare la recherche valéryenne avec celle menée par Proust. Dans cette conférence, je voudrais mettre en lumière l'enjeu de cet intérêt pour le sommeil et le rêve chez Valéry et Proust. À la fin de l'exposé, j'invoquerai le Journal des rêves de Myōe (1173-1232), moine bouddhiste japonais de l'époque de Kamakura. Son journal des rêves est très lu au Japon et continue à inspirer des romanciers et des psychanalystes. Je citerai Myōe pour relativiser le point de vue établi par la double lecture de Valéry et de Proust.
Quel est donc l'enjeu des études de Valéry sur le rêve ? Il consiste non pas à sonder le passé enfoui dans la mémoire, mais à transformer la conception même du présent en y introduisant une forme de conscience radicalement différente de la conscience éveillée. Notons que Valéry a considéré le rêve comme une forme de conscience, et non pas comme une manifestation de l'inconscient. La « conscience sous le sommeil » a pourtant quelque chose d'étrange, parce que, dès le réveil, on ne peut plus la reconstruire telle quelle. Nous ne connaissons le rêve qu'à travers le souvenir et le récit, souvent défigurés et défaillants, qui ne sont pas selon Valéry des moyens fiables pour examiner le phénomène. D'où cette observation constante dans les cahiers : « Le rêve est le phénomène que nous n'observons que pendant son absence. Le verbe rêver n'a presque pas de "présent". » (C, V, 351) Peut-on saisir le rêve dans son état naissant, tout en gardant une conscience lucide ? Est-il possible de construire un rêve en étant éveillé ?
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William Marx
Littératures comparées
Collège de France
Année 2023-2024
Comment lire ?
Séminaire - Frédérique Leichter-Flack : Lire en situation extrême. Sur une scène de la vie morale au goulag
Intervenant(s) :
Maxime Decout
Sorbonne Université
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William Marx
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07 - Comment lire ? - Proust et la lecture décevante
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Année 2023-2024
06 - Comment lire ? - Vivre et grandir par les livres
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05 - Comment lire ? - Toute notre vie est lecture
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04 - Comment lire ? - Si Peau d'Âne m'était conté
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Comment lire ?
Séminaire - Philippe Bordas : Pour Carlo Emilio Gadda
Intervenant(s) :
Philippe Bordas
Photographe et écrivain
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Littératures comparées
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Année 2023-2024
03 - Comment lire ? - Lire les détails
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02 - Comment lire ? - Le goût des livres
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Comment lire ?
Séminaire - Pierre Assouline : Profession : lecteur
Intervenant(s) :
Pierre Assouline
de l'Académie Goncourt
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Année 2023-2024
01 - Comment lire ? - Lire : une tâche utopique
Résumé
Dans son Cours de poétique, Paul Valéry expliquait que le sentiment esthétique était ce qui reste quand tout s'est effondré autour de nous. Il y a là une sorte de cogito esthétique, à la manière de Descartes : non pas « je pense, donc je suis », mais « j'éprouve la beauté, donc je suis ». Lire est une activité intense, qui emporte tout l'être. Mais qu'est-ce que lire ? Le terme en français désigne deux activités différentes, quoique complémentaires. Savoir lire, c'est d'abord savoir déchiffrer littéralement un texte écrit. Mais lire, c'est aussi savoir comprendre et interpréter ce texte. Cette nécessité de l'interprétation est fondamentale, car le sens d'un texte ne se donne pas de lui-même. Il y a plusieurs interprétations possibles d'un texte, dont certaines sont meilleures et plus valables que les autres. Ce qu'on nomme par commodité de langage le vrai sens d'un texte est le résultat d'une construction complexe faite par le lecteur. Comme l'explique Ortega y Gasset, pour pouvoir parler, nous devons taire beaucoup de choses, le silence est une condition de la parole, et le lecteur, pour reconstituer le message, doit « construire laborieusement [en lui-même] toute la réalité mentale non dite » dans le texte. « Lire avec sérieux et sincérité » : voilà tout l'enjeu. C'est une question d'épistémologie et d'éthique. Le Saint Jérôme d'Antonello da Messina illustre fort bien cette « tâche utopique » de la lecture. Et aujourd'hui, quand se multiplient les lectures de type inquisitorial et la critique radicale des textes (cancel culture, wokism, entre autres), il convient de replacer ces nouvelles façons de lire dans un panorama historique et culturel des modes de lecture et d'interprétation.
Auteurs et œuvres cités
Paul Valéry, Cours de poétique, Histoires brisées. René Descartes, Discours de la méthode. Miguel de Cervantès, Don Quichotte. Gustave Flaubert, Madame Bovary. William K. Wimsatt, « The Intentional Fallacy ». Roland Barthes, « La Mort de l'auteur ». Aristote. Platon. Emmanuel Kant. Gottfried Wilhelm Leibniz. John Wilkins. Friedrich Nietzsche. José Ortega y Gasset, Qu'est-ce que lire ? Andrei Minzetanu, La Lecture vertueuse. Antonello da Messina, Saint Jérôme dans son étude. Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit.
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William Marx
Littératures comparées
Collège de France
Année 2023-2024
Colloque - Litterae latinae : pour une histoire littéraire de Rome - Conclusion
Intervenant(s)
Florence Dupont (Université Paris Cité)
Y a-t-il une littérature à Rome ? Autrement dit, ce que nous nommons aujourd'hui littérature, avec toutes les qualités et fonctions qui y sont habituellement attachées, existait‑il déjà dans l'antiquité romaine ? La question a été posée sans relâche par Florence Dupont dans toute son œuvre de latiniste et d'helléniste, l'une des plus originales et marquantes des cinquante dernières années. Elle y revient tout récemment dans sa monumentale Histoire littéraire de Rome : de Romulus à Ovide, une culture de la traduction (2022). Cette approche anthropologique et sociale des objets dits littéraires intéresse évidemment le comparatisme, et c'est pourquoi il a paru important de réunir professeurs du Collège de France et spécialistes de diverses disciplines (littératures, droit, histoire) et de diverses périodes et aires culturelles pour réfléchir ensemble à la question du littéraire à Rome.
Le colloque se poursuivra le samedi 14 octobre de 9 heures à 18 heures dans l'amphithéâtre Alan Turing de l'Université Paris Cité, Campus des Grands Moulins, 8, place Aurélie Nemours, 75013 Paris.
Partenaires du colloque
Collège de France, chaire Littératures comparées
Université Paris Cité, CERILAC
Université Sorbonne Nouvelle, CERC
Université Paris Nanterre, UFR PHILLIA, Littérature et poétique comparées
ANHIMA (CNRS)
Antiquité territoire des Écarts
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