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  • Le compositeur – arrangeur, soucieux du timbre en arrive Ă  crĂ©er, de façon parfaitement consciente, un son, en d’autres termes, un timbre sonore reconnaissable, puisque celui-ci a Ă©tĂ© pensĂ© comme tel, dĂšs sa conception.“Chez Morricone il y a ces alliages, comme associer une guimbarde, une guitare Ă©lectrique et des choeurs d’orchestre. (
) Au bout de 10 secondes d’une musique, on sait que c’est la sienne, de quel film il s’agit, on voit les images
”. Petit Ă  petit, la patte du compositeur se reconnaĂźt (citation du musicien et compositeur Jean-Michel Jarre). « Et, progressivement, c’est devenu un style, quelque chose de tout Ă  fait reconnaissable, qui me concerne au premier chef, et que l’on reconnait non seulement Ă  l’écoute, mais aussi en le voyant Ă©crit. Je crois que je n’ai rien renouvelĂ©. Je n’ai renouvelĂ© que mon langage, petit Ă  petit, selon mes exigences intĂ©rieures et celles de la technique du cinĂ©ma ” (source : Documentaire diffusĂ© sur la chaine Arte en 2007).

    Est-il opportun de rappeler qu’au mĂȘme moment oĂč il Ă©volue dans le cinĂ©ma en qualitĂ© de concepteur de bandes-son, Morricone se livre Ă  la crĂ©ation de partitions classiques, avec une mĂ©thode et approche identiques Ă  celles exposĂ©es prĂ©cĂ©demment ?

  • Avec ce premier Oscar pour une de ses partitions, le Maestro revenait de loin ! De trĂšs loin mĂȘme si l’on examine l’ensemble de distributions de prix qui le concerne. Avant la fin de la dĂ©cennie 80, ses confrĂšres ne se bousculaient pas pour le rĂ©compenser. Les cĂ©nacles en tout genre rechignaient Ă  le primer. DĂšs le dĂ©but des annĂ©es 90, la reconnaissance de ses pairs finit par arriver. Tardivement certes, eu Ă©gard Ă  son palmarĂšs plus qu’éloquent, mais sĂ»rement, dans la mesure oĂč toutes les acadĂ©mies et festivals lui rendirent finalement hommage. Ennio Morricone devint incontournable tant sa musique se diffusait partout ! Par « partout », il faut entendre les salles de cinĂ©ma bien sĂ»r, les tĂ©lĂ©visions et les radios du monde entier, les sites Internet d’écoute de musique et les supports comme les CD. « Avec 27 Disques d’or et 7 Disques de platine, la musique d’Ennio Morricone a atteint une renommĂ©e qui a bien peu d’égal dans le cercle trĂšs fermĂ© des grands compositeurs de musiques de films.  Â» Au moment de son dĂ©cĂšs, il avait vendu sur les cinq continents entre 70 et 80 millions de disques / CD. Des groupes lui rendirent hommage dans leurs concerts ou leurs albums comme les groupes Metallica, Nightwish, ou encore Michel Polnareff ou CĂ©line Dion.

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  • La musique absolue ! L’expression Ă©manait du Maestro qui prenait un vrai plaisir Ă  l’évoquer lorsque les entretiens avec les journalistes ou autres, prenaient une tournure qui lui Ă©tait agrĂ©able. Il dĂ©signait par-lĂ  la possibilitĂ© pour le compositeur de s’adonner Ă  l’écriture musicale sans contrainte autres que celles qu’il se fixait lui-mĂȘme. Bien sĂ»r, Morricone intĂ©grait Ă  sa dĂ©finition les attentes du public pour un genre donnĂ©. Celles-ci diffĂ©rent selon qu’il s’agisse par exemple d’une musique de chambre ou d’un concerto. Mis Ă  part ce qu’il nommait par « conditionnement », le musicien restait libre de sa partition et pouvait profiter de l’immensitĂ© du champ de composition. Et pour reprendre une dĂ©finition de Jean-Paul Sartre, « la libertĂ© est ce petit mouvement qui fait qu‘on ne restitue pas la totalitĂ© de son conditionnement ». De fait, le crĂ©ateur de musique dispose-t-il de la facultĂ© d’exister rĂ©ellement dans son Ă©criture « absolue », d’exprimer son « moi » et faire preuve sinon de gĂ©nie, au moins d’inventivitĂ© pour repousser les limites du genre dans lequel il inscrit sa crĂ©ation (ou bien le rĂ©inventer).

    C’est dire enfin si nous sommes confrontĂ©s Ă  un exercice qui se distingue totalement de la crĂ©ation musicale pour le compte d’autrui et notamment pour le cinĂ©ma.

    « Une sĂ©paration stricte que conteste StĂ©phane Lerouge, spĂ©cialiste de la musique Ă  l'image : la musique a toujours Ă©tĂ© Ă©crite sur commande. Ce n'est pas parce qu'on Ă©crit une musique sur commande qu'elle est infĂ©rieure, ou "pas absolue" »[1]. Le Maestro ne pouvait en effet pas l’ignorer : bon nombre de grandes partitions classiques, telle la messe de requiem en rĂ© mineur de Mozart, existĂšrent parce qu’une commande arriva. Et celle-ci, entrainait forcĂ©ment toute une sĂ©rie de contraintes Ă  respecter afin que la partition livrĂ©e corresponde aux dĂ©sirs du donneur d’ordre.

    [1] France Culture « Ennio Morricone : Caio Maestro » diffusé le 7 juillet 2020.

  • A l’aube de ses cinquante ans, le Maestro se plaçait dĂ©sormais, et sans conteste, parmi les compositeurs incontournables pour le cinĂ©ma mondial. L’annĂ©e suivante, il signa L’Île sanglante (The Island) de Michael Ritchie avant d’aborder FenĂȘtres sur New York (Windows) de Gordon Willis en 1980, puis Les Fesses Ă  l’air (So fine) d’Andrew Bergman et surtout The Thing de John Carpenter en 1982. Toujours en 1982, il travailla sur trois autres films : DressĂ© pour tuer (White dog) de Samuel Fuller, Butterfly de Matt Cimber, V comme Vengeance (A Time to Die) de Matt Cimber. De 1984 Ă  1989, il composa encore neuf musiques de films amĂ©ricains, dont un nouveau avec Samuel Fuller Les Voleurs de la nuit en 1984, et un autre avec William Friedkin, le rĂ©alisateur du premier Exorciste, pour un film dispensable intitulĂ© Le sang du chĂątiment (Rampage) en 1987.

  • Si cette histoire de trois hommes, cupides et bandits Ă  des degrĂ©s divers, qui tentaient de s’emparer d’un trĂ©sor au temps de la guerre civile, ravit d’emblĂ©e le public, la bande son ne fut pas en reste ! Elle resta Ă  tout jamais gravĂ©e dans l’univers des chefs-d’Ɠuvre des musiques pour l’écran. La partition du compositeur se rĂ©vĂ©la tout Ă  fait originale au sens strict du terme en raison de son cĂŽtĂ© inĂ©dit. L’instrumentation lĂ  encore trĂšs originale, reposait sur une conception musicale sans Ă©quivalent, singuliĂšre et trĂšs Ă©clectique, voire trĂšs audacieuse, frisant souvent avec l’opĂ©ra baroque, entre touches d’humour et vrai lyrisme.

    Ennio Morricone eut en effet recours Ă  plusieurs instruments. On retrouvait bien sĂ»r les sifflements du soliste Alessandro Alessandroni, les vocalises insolites du chƓur Ă  huit voix Cantori Moderni, une guitare Ă©lectrique, l’orgue Hammond, le piano Ă©lectrique Rhodes, le synket (dĂ©jĂ  Ă©voquĂ©), ainsi qu’un chƓur d’hommes poussant des cris guerriers « go, go
 Â»). Morricone y ajouta une flĂ»te Ă  bec soprano, une trompette-piccolo, un arghilofono, une guitare mexicaine, et pour agrĂ©menter le tout, quelques solistes (comme Edda Dell’Orso) que le compositeur prit un malin plaisir Ă  faire intervenir de multiples fois. La convocation de multiples instruments, Ă  priori surprenants atypiques et difficiles Ă  marier, rĂ©sultait pour une grande part de la formation post-webernienne de Morricone qui se caractĂ©risait par une pratique musicale Ă  base d’instruments atypiques.

  • Lorsque Sergio Leone sonna Ă  la porte d’Ennio Morricone Ă  Monteverde Vecchio au printemps 1964, ce dernier, en lui ouvrant, reconnut en lui un ancien camarade de classe, grĂące Ă  un petit pli particulier qu’il avait conservĂ© au coin d’une lĂšvre. Il se souvint que gamins, ils usaient leurs fonds de culotte sur les bancs d’une Ă©cole du quartier du Trastevere. Il retrouva mĂȘme une photo de classe oĂč ils figuraient tous les deux
 Cette entrĂ©e en matiĂšre pour les deux hommes, qui s’étaient perdus de vue durant presque trois dĂ©cennies, Ă©tait de bon augure.

  • A partir de la fin des annĂ©es quarante, Morricone collabore de plus en plus avec des orchestres de variĂ©tĂ©s radiophoniques et des vedettes de la chanson italienne et internationale en qualitĂ© d'arrangeur. Domaine dans lequel il se fait trĂšs vite un nom. 

  • Ennio Morricone est nĂ© le 10 novembre 1928 Ă  Rome dans le quartier de Trastevere. Ce podcast se propose de dĂ©crire sa plus tendre enfance, ses parents Mario et Libera, son frĂšre et ses soeurs dans l'Italie fasciste d'avant-guerre.