エピソード
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1. Introduction
Dans cet épisode, Michel Onfray conclut son analyse de Charles Fourier en détaillant le concept de féérie sociétaire, un projet global qui vise à transformer la société en un espace harmonieux, joyeux, et sans répression des passions. Onfray montre comment Fourier entend réhabiliter toutes les passions humaines, refusant la morale ascétique dominante, pour construire une société où l’individu peut pleinement s’épanouir.
2. Les passions : moteur de la société harmonieuse
Fourier rompt radicalement avec la tradition philosophique occidentale qui diabolise les passions. Pour lui :
* Toutes les passions sont bonnes par essence.
* Le problème vient de leur mauvais usage en civilisation, qui génère frustration, sadisme, masochisme et névrose.
* Il propose de les canaliser dans un cadre collectif joyeux et organisé : la féérie sociétaire.
3. Féminisme avant l’heure : l’émancipation des femmes
Fourier affirme que la manière dont une société traite les femmes révèle son niveau de civilisation. Il défend :
* L’égalité totale entre hommes et femmes.
* La libération des femmes du mariage, des maternités imposées et de la soumission domestique.
* L’idée que l’émancipation de l’humanité passe par celle des femmes.
4. Un utilitarisme hédoniste et conséquentialiste
Influencé par Bentham, Fourier développe un utilitarisme singulier :
* Une chose n’est bonne ou mauvaise qu’en fonction de ses conséquences concrètes sur le bonheur collectif.
* Il propose d’intégrer toutes les passions (y compris sexuelles) dans la société, tant qu’elles augmentent le plaisir sans nuire à autrui.
* Il refuse tout interdit moral rigide, au profit d’une morale du plaisir partagé.
5. Le phalanstère : architecture de la féérie sociétaire
Le phalanstère est l’espace où cette société idéale se réalise :
* Communauté de 1800 personnes, organisée autour de séries d’activités multiples.
* Architecture pensée pour satisfaire les passions : gastronomie, musique, amour, nature...
* Chacun y cultive ses talents, variés, sans ennui ni division entre manuel et intellectuel.
6. Réhabilitation du travail, des sens et des plaisirs
Fourier défend :
* Un travail ludique, varié, fondé sur la passion papillonnante.
* L’éloge des cinq sens, y compris les plus méprisés (goût, toucher, olfaction).
* La gastrosophie, qui unit plaisir culinaire, santé, culture et convivialité.
7. Liberté sexuelle et pluralité des pratiques
Fourier va très loin dans la défense de la liberté sexuelle :
* Il légitime toutes les formes d’amour : fidélité, infidélité, polygamie, homosexualité, voyeurisme, fétichisme, etc.
* Il propose des cérémonies amoureuses et festives, déculpabilisées, où chacun choisit librement ses partenaires.
* La sexualité devient une passion positive, intégrée dans la société harmonieuse, loin des tabous et des névroses.
💡 Conclusion
Avec sa féérie sociétaire, Charles Fourier imagine une société où les passions humaines, loin d’être réprimées, deviennent la base d’une organisation joyeuse, égalitaire et épanouissante. En réhabilitant les plaisirs, les sens, les femmes, et les désirs multiples, il anticipe des thématiques aussi variées que l’écologie, le féminisme, l’éducation libertaire et la liberté sexuelle. Sa vision d’un bonheur collectif fondé sur l’émancipation des passions reste profondément subversive et moderne.
📚 Philosophes et concepts mentionnés
* Spinoza (1632-1677) — Philosophe rationaliste, défenseur du panthéisme et des passions joyeuses.
* Diderot (1713-1784) — Philosophe des Lumières, critique du dualisme corps/esprit.
* Jeremy Bentham (1748-1832) — Philosophe britannique, père de l’utilitarisme, influençant Fourier.
* Charles Fourier (1772-1837) — Philosophe français, théoricien du phalanstère, du socialisme harmonieux, féministe et libertaire avant l’heure.
* Pierre-Joseph Proudhon (1809-1865) — Philosophe anarchiste français, contemporain de Fourier.
* Karl Marx (1818-1883) — Philosophe allemand, théoricien du communisme, opposé à la voie réformiste de Fourier.
* Sigmund Freud (1856-1939) — Psychanalyste autrichien, précurseur de l’analyse des pulsions, dont Fourier anticipe certains concepts.
Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie
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1. Introduction
Dans cette conférence, Michel Onfray poursuit son étude approfondie de Charles Fourier, en insistant sur l’aspect métaphysique et cosmologique de sa pensée. Loin de se limiter à une doctrine économique ou sociale, Fourier développe une véritable gnose post-industrielle, où chaque élément du monde, des passions humaines aux planètes, obéit à des analogies et correspondances profondes. Onfray déchiffre cette pensée foisonnante et souvent jugée fantasque, révélant son lien avec le gnosticisme, le panthéisme et l'écologie avant l’heure.
2. Un philosophe gothique : style et complexité de l'œuvre
Fourier élabore son système dans un style baroque, marqué par :
* Une abondance de néologismes (phalanstère, gastrosophie, papillonnante…).
* Une prolifération de tableaux, schémas, chiffres et classifications détaillées.
* L’usage de personnages conceptuels (comme Fakma dans son érotique). Onfray compare son œuvre aux châteaux de Louis II de Bavière : un monde exubérant, désordonné, où le lecteur doit décoder un langage propre.
3. Gnosticisme et analogies : une cosmologie totalisante
Fourier reprend certains éléments du gnosticisme ancien, tout en les réinterprétant :
* Il postule une gnose, une connaissance cachée de l’univers, dont lui seul détient la clé.
* Il élabore une théorie de l’analogie : tout dans le monde est lié, des comportements humains aux phénomènes cosmiques.
* La copulation des planètes, l’importance des animaux (girafe, chardonneret), ou encore des végétaux, répondent à cette logique universelle.
Son panthéisme repose sur l'idée que Dieu et le monde ne font qu’un, animés par une force unique : l’attraction passionnée.
4. L’attraction passionnée : moteur divin et social
Fourier conçoit l’attraction passionnée comme l’impulsion donnée par Dieu à l’univers :
* Elle explique l’ordre du monde, depuis les passions humaines jusqu’à la mécanique céleste.
* Elle légitime toutes les passions, aucune n’étant mauvaise en soi, seule leur civilisation (au sens négatif) les pervertit.
* Elle annonce une société future, l’harmonie, où toutes les passions seront satisfaites librement.
5. Une critique du capitalisme libéral et du productivisme
Fourier dénonce le libéralisme économique, qu’il accuse de générer misère, aliénation et destruction. Selon lui :
* Le commerce sans frein est immoral.
* La pauvreté naît de l’abondance capitaliste.
* La planète est menacée par l’industrialisme, bien avant les penseurs écologistes modernes.
Il propose un modèle fondé sur les phalanges : des communautés autogérées, respectueuses des passions, des besoins réels et des ressources naturelles.
6. Une pensée écologique avant l’heure
Fourier anticipe des préoccupations écologistes majeures :
* Déforestation, pollution, surconsommation des ressources.
* Malbouffe et produits frelatés liés à la recherche du profit.
* Déséquilibre des climats et dégradation de la planète.
Il défend une société où l’économie respecte les cycles naturels et humains, critique les excès de productivité et prône une sobriété harmonieuse.
💡 Conclusion
Michel Onfray révèle en Fourier un penseur bien plus qu’excentrique : un visionnaire gnostique, critique du capitalisme, précurseur de l’écologie, défenseur d’une société libre fondée sur la satisfaction des passions. Sa théorie de l’analogie et de l’attraction passionnée dessine un monde où l’humain et le cosmos sont liés, appelant à dépasser le productivisme pour renouer avec un ordre naturel, sensuel et juste.
📚 Philosophes et concepts mentionnés
* Socrate (env. 470-399 av. J.-C.) — Philosophe grec, mentionné comme personnage conceptuel chez Platon.
* Platon (env. 428-348 av. J.-C.) — Philosophe grec, référence indirecte via le platonisme des gnostiques.
* Spinoza (1632-1677) — Philosophe rationaliste, défenseur d’un panthéisme proche de celui de Fourier.
* Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) — Philosophe des Lumières, critique de la civilisation, influençant Fourier.
* Claude-Adrien Helvétius (1715-1771) — Philosophe matérialiste, défenseur de l’éducation et du déterminisme social.
* Jeremy Bentham (1748-1832) — Philosophe britannique, père de l’utilitarisme libéral critiqué par Fourier.
* Charles Fourier (1772-1837) — Philosophe français, inventeur du phalanstère, théoricien de l’harmonie et précurseur de l’écologie.
* Schelling (1775-1854) — Philosophe allemand, cité par Fourier pour son idée de liaison universelle.
* Pierre-Joseph Proudhon (1809-1865) — Philosophe anarchiste français, critique de la propriété privée.
* Mikhaïl Bakounine (1814-1876) — Philosophe anarchiste russe, défenseur d’un socialisme anti-autoritaire.
* Karl Marx (1818-1883) — Philosophe allemand, théoricien du communisme, opposé à Fourier sur le rôle de la révolution.
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1. Introduction
Dans cet épisode, Michel Onfray présente Charles Fourier, penseur inclassable du début du XIXe siècle, souvent relégué au rang d’excentrique en raison de ses propositions extravagantes. Pourtant, Onfray insiste sur la nécessité de dépasser les apparences pour découvrir la véritable pensée sociale, politique et cosmologique de Fourier, qu’il qualifie de gnostique licencieux, mêlant réformes concrètes et imaginaire poétique débridé.
2. Un socialisme atypique : le refus des étiquettes
Onfray critique l’étiquette habituelle de "socialiste utopique" accolée à Fourier. Selon lui, Fourier est difficile à classer : il propose un socialisme anti-autoritaire, sans révolution violente, refusant à la fois les systèmes marxistes et libéraux. Sa vision repose sur une transformation progressive et joyeuse du monde, par la mise en place de phalanstères, micro-communautés autogérées devant faire advenir une harmonie généralisée.
3. Les extravagances assumées : cosmologie, sexualité et gastrosophie
Fourier est célèbre pour ses propositions surprenantes :
* Les planètes copulent, produisent des anti-animaux et anti-girafes.
* Les humains auront un jour un archibras (troisième bras) et les habitants du Soleil disposeront d’une queue.
* Il prône un Nouveau Monde amoureux, où toutes les pratiques sexuelles sont acceptées, abolissant les tabous, le mariage, les exclusions sociales et sexuelles.
* Il invente la gastrosophie, une sagesse fondée sur le plaisir culinaire partagé.
Mais derrière ces fantaisies se cache une réflexion sérieuse sur la libération des passions humaines et la critique de la répression morale issue du christianisme et du capitalisme.
4. L’expérience personnelle au service d’un projet global
Fourier élabore son système en réaction à ses propres expériences :
* Issu d’un milieu commerçant, il rejette le capitalisme libéral, ayant constaté la spéculation, la misère et la destruction des ressources.
* Sa critique du commerce et des intermédiaires vient de scènes vécues (comme la destruction d’une cargaison de riz à Marseille pour des raisons spéculatives).
* Célibataire endurci et amateur de bordels, il transpose ses propres frustrations dans son projet de société harmonieuse, sensuelle et égalitaire.
5. Critique de la Révolution française et des philosophes rationalistes
Fourier se montre hostile à la Révolution française, qu’il associe à la terreur, à l’austérité républicaine et au moralisme ascétique. Il déteste Robespierre, l’être suprême, et les idéaux révolutionnaires abstraits. Il rejette également les philosophes des Lumières (Voltaire, Rousseau, Diderot), qu’il accuse d’être verbeux, idéalistes et coupés du réel. Pour lui, seuls comptent les penseurs concrets capables de transformer effectivement la société.
💡 Conclusion
Charles Fourier apparaît chez Onfray comme un philosophe inclassable et radical, défenseur d’une société fondée sur le plaisir, l’émancipation des passions et la coopération libre. Derrière son imaginaire foisonnant et ses extravagances cosmologiques se cache un projet sérieux : celui d’un monde sans exploitation, sans répression morale, et respectueux de la nature. Sa critique du capitalisme, son féminisme avant l’heure et sa vision écologiste font de lui une figure toujours pertinente.
📚 Philosophes et concepts mentionnés
* Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) — Philosophe des Lumières, auteur du Contrat social.
* Claude-Adrien Helvétius (1715-1771) — Philosophe matérialiste, théoricien du déterminisme éducatif.
* Jeremy Bentham (1748-1832) — Philosophe britannique, père de l’utilitarisme libéral.
* Charles Fourier (1772-1837) — Philosophe français, inventeur du phalanstère et du socialisme libertaire, défenseur d’une société harmonieuse fondée sur les passions.
* Auguste Comte (1798-1857) — Philosophe positiviste, fondateur du concept de sociologie.
* Pierre-Joseph Proudhon (1809-1865) — Philosophe anarchiste français, critique du capitalisme et du pouvoir étatique.
* Mikhaïl Bakounine (1814-1876) — Philosophe anarchiste russe.
* Karl Marx (1818-1883) — Philosophe allemand, théoricien du matérialisme historique.
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1. Introduction
Dans cette conférence, Michel Onfray termine son exploration de la pensée de Robert Owen, figure clé du socialisme du XIXe siècle. Il met l’accent sur la vision optimiste d’Owen, fondée sur la possibilité d’améliorer les individus et la société par l’éducation, la justice sociale et la répartition équitable des richesses. Cette réflexion permet à Onfray d’exposer les grandes idées qui distinguent clairement la gauche de la droite.
2. L’homme nouveau par l’éducation
Owen, influencé par Rousseau et Helvétius, croit fermement que l’homme est façonné par l’éducation et que c’est en transformant les conditions sociales que l’on peut faire advenir un homme nouveau, libre et heureux. Il défend une pédagogie libertaire avant l’heure :
* Scolarisation dès 2 ans, sans autorité ni châtiments.
* Importance de l’apprentissage par la nature, les activités concrètes et l’absence de punition.
* Refus du dogme religieux dans l’enseignement.
3. La critique du libéralisme : justice contre charité
Owen s’oppose fermement au libéralisme économique, qu’il accuse de générer la paupérisation :
* Le capitalisme concentre les richesses, augmente la misère et favorise l’exploitation.
* La charité chrétienne ne résout rien ; seule la justice sociale (meilleure répartition des richesses) permet de supprimer la pauvreté.
4. Socialisme réformiste, non violent et pragmatique
Contrairement aux marxistes révolutionnaires, Owen prône un socialisme réformiste, fondé sur :
* La persuasion, la discussion, la diffusion d’idées (pas la violence).
* La création de micro-communautés comme New Lanark, véritables laboratoires sociaux.
* Le développement d’un système public garantissant l’éducation, l’emploi (via des grands travaux publics), la santé et la retraite pour tous.
5. La politique comme éthique
Owen ne sépare jamais politique et morale. Pour lui, la finalité de la politique est d’assurer le bonheur collectif. La prospérité d’une nation ne se mesure pas à la richesse accumulée, mais au bien-être effectif de ses citoyens.
💡 Conclusion
Robert Owen incarne un socialisme humaniste, optimiste et pragmatique, fondé sur l’éducation, la justice économique et la confiance en la perfectibilité humaine. Son rejet du libéralisme, sa foi dans la pédagogie, son militantisme pacifique et son projet d’une société harmonieuse font de lui une figure fondatrice du socialisme réformiste, toujours pertinente face aux inégalités contemporaines.
📚 Philosophes et concepts mentionnés
* Socrate (env. 470-399 av. J.-C.) — Philosophe grec, défenseur de la vertu et du questionnement éthique.
* Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) — Philosophe des Lumières, auteur du Contrat social et de L’Émile.
* Claude-Adrien Helvétius (1715-1771) — Philosophe matérialiste, défenseur du déterminisme social par l’éducation.
* Jeremy Bentham (1748-1832) — Philosophe britannique, fondateur de l’utilitarisme libéral.
* William Godwin (1756-1836) — Philosophe anarchiste britannique, partisan de la réforme par la raison.
* Robert Owen (1771-1858) — Entrepreneur et réformateur social britannique, fondateur du socialisme réformiste.
* Charles Fourier (1772-1837) — Socialiste utopiste français, promoteur des phalanstères.
* Karl Marx (1818-1883) — Philosophe et économiste allemand, théoricien du communisme révolutionnaire.
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1. Introduction
Dans cette conférence, Michel Onfray poursuit son analyse de Robert Owen, en abordant la dimension politique et sociale de son projet : l’idée d’une république libertaire universelle. Onfray insiste sur la nécessité de comprendre les notions de socialisme, communisme, ou anarchisme à l’époque d’Owen, au XIXe siècle, sans les anachronismes liés aux déformations du XXe siècle.
2. Une République universelle : le bien commun à l’échelle planétaire
Owen défend une vision de la République inspirée de la res publica romaine, fondée sur le bien public et l’intérêt général, sans nécessairement opposer monarchie et République. Sa nouveauté réside dans l’idée que cette révolution ne doit pas être locale mais universelle, visant à instaurer partout une organisation sociale plus juste.
3. Un communisme agraire et progressif
Owen ne suit ni Marx ni la logique industrielle dominante. Il propose un communisme agraire, reposant sur :
* La nationalisation progressive du sol.
* Une répartition égalitaire des biens.
* L’organisation du territoire en petites communes fédérées. Son modèle privilégie la campagne et les producteurs agricoles, contre le culte de l'industrie.
4. L’éducation, clé de la transformation sociale
Fidèle à ses idées, Owen insiste sur une éducation communautaire des enfants, laïque et émancipatrice. Il croit fermement que l’éducation collective peut abolir l’inégalité, les préjugés, et façonner des individus libres, coopératifs et harmonieux.
5. Trois piliers à abattre : propriété privée, religion, mariage
Owen identifie trois institutions à abolir pour instaurer la justice sociale :
* La propriété privée, source d’exploitation et d’inégalité.
* La religion chrétienne, légitimant l’ordre établi, le pouvoir et la résignation.
* Le mariage, qu’il considère comme une institution oppressive, responsable de frustrations, d’hypocrisie, et de reproduction des inégalités.
Il propose une société où les liens sociaux et familiaux reposent sur le sentiment librement consenti et non sur des contraintes légales ou religieuses.
6. Une pensée libertaire, anti-étatique et fédéraliste
Owen prône la disparition des gouvernements centraux au profit d’une organisation fédérative, rejoignant les idées anarchistes avant l’heure. Il défend un modèle de société où les décisions se prennent à la base, par les communautés elles-mêmes, sans recours à un pouvoir extérieur.
💡 Conclusion
Robert Owen incarne un socialisme libertaire avant la lettre, combinant la critique du libéralisme, la remise en cause des institutions traditionnelles et la défense d’une société fondée sur l’égalité, l’éducation, et l’autogestion. Sa proposition d’une république universelle anticipe les idées anarchistes et socialistes fédéralistes, posant les bases d’un projet radicalement anti-autoritaire, humaniste et progressiste.
📚 Philosophes et concepts mentionnés
* Abbé Meslier (1664-1729) — Prêtre et précurseur du communisme agraire.
* Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) — Philosophe des Lumières, auteur du Contrat social.
* Helvétius (1715-1771) — Philosophe matérialiste français, promoteur du déterminisme social.
* Jeremy Bentham (1748-1832) — Philosophe britannique, théoricien du libéralisme utilitariste.
* Hegel (1770-1831) — Philosophe allemand, auteur de Principes de la philosophie du droit.
* Charles Fourier (1772-1837) — Socialiste utopique français, théoricien du phalanstère.
* Pierre-Joseph Proudhon (1809-1865) — Philosophe anarchiste français, auteur de Qu’est-ce que la propriété ?.
* Mikhaïl Bakounine (1814-1876) — Philosophe anarchiste russe.
* Karl Marx (1818-1883) — Philosophe et économiste allemand, théoricien du matérialisme historique.
* Simone de Beauvoir (1908-1986) — Philosophe et féministe française, autrice du Deuxième Sexe.
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1. Introduction
Dans cet épisode, Michel Onfray consacre son analyse à Robert Owen, qu’il présente comme l’un des premiers penseurs et praticiens du socialisme au XIXe siècle. Owen se distingue par son expérience concrète : il est à la fois entrepreneur capitaliste, réformateur social et théoricien socialiste. Onfray met en lumière l’originalité d’Owen, figure clé d’un socialisme réformiste, opposé aux excès du libéralisme économique et au communisme révolutionnaire.
2. Un entrepreneur réformateur
Owen commence sa carrière comme entrepreneur dans le secteur textile, dirigeant la grande filature de New Lanark. Très vite, il se démarque par une gestion innovante, cherchant à améliorer la condition des ouvriers tout en augmentant la rentabilité de l’entreprise. Il met en place :
* Réduction du temps de travail (10h75 au lieu de 14-15 heures).
* Interdiction du travail des enfants avant 10 ans, avec obligation qu’ils sachent lire, écrire, compter.
* Logements décents, hôpital gratuit et épiceries sociales pour ses ouvriers.
3. L’éducation et l’automatisme du bien
Owen accorde une place centrale à l’éducation. Il invente une pédagogie fondée sur :
* Une approche laïque et non religieuse.
* L’idée que l’apprentissage doit se faire par le plaisir et la vie réelle, non par la contrainte.
* Le principe du "fais à autrui ce que tu voudrais qu’il te fasse", visant à créer l’automatisme du bien dès le plus jeune âge.
4. Socialisme réformiste et critique du libéralisme
Owen s’oppose à la logique libérale dominante qui considère que le marché produit mécaniquement le bonheur général. Selon lui, le capitalisme entraîne surtout paupérisation, exploitation et déshumanisation. Mais contrairement à Marx, il pense que la transformation sociale peut venir par en haut, via des réformes menées par des dirigeants éclairés, et non par la révolution des masses.
5. Expériences utopiques : New Harmony et limites
Après avoir quitté New Lanark, Owen tente de créer des micro-sociétés communautaires aux États-Unis et en Angleterre (notamment New Harmony), espérant que ces modèles alternatifs se propageraient. Ces expériences échouent, révélant les limites d’une transformation par petites communautés sans prise sur les structures globales du pouvoir économique.
💡 Conclusion
Robert Owen incarne un socialisme humaniste et pragmatique, refusant à la fois le laisser-faire libéral et les révolutions violentes. Son projet repose sur une conviction forte : changer la société passe par l’éducation, la justice sociale et l’amélioration des conditions de vie concrètes. Par ses réformes avant-gardistes, il jette les bases d’une pensée socialiste réformiste encore actuelle, où la transformation passe par des actes, et non seulement par des théories.
📚 Philosophes et concepts mentionnés
* Adam Smith (1723-1790) — Économiste écossais, théoricien du libéralisme et de la division du travail.
* Jeremy Bentham (1748-1832) — Philosophe britannique, fondateur de l’utilitarisme.
* Jean-Baptiste Say (1767-1832) — Économiste français, défenseur du libéralisme économique.
* Robert Owen (1771 – 1858) — Industriel et réformateur social gallois, précurseur du socialisme utopique et du mouvement coopératif.
* Charles Fourier (1772-1837) — Penseur utopiste français, promoteur des phalanstères.
* Pierre Leroux (1797-1871) — Philosophe français, introduit le mot "socialisme" en France.
* Flora Tristan (1803-1844) — Féministe et socialiste française, témoin des conditions ouvrières en Angleterre.
* Karl Marx (1818-1883) — Philosophe et économiste allemand, théoricien du communisme.
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1. Introduction
Dans ce premier épisode de la saison 10, Michel Onfray poursuit son analyse approfondie de John Stuart Mill, en s'intéressant à son ouvrage majeur De la liberté. Il met en parallèle la pensée de Mill avec celle de Karl Marx, soulignant leurs visions radicalement opposées sur la transformation sociale : là où Marx prône la révolution économique et l'abolition du capitalisme, Mill préfère une réforme progressive, défendant un socialisme tempéré, fondé sur l’éducation, l’individualisme et la justice sociale.
2. Stuart Mill face à Marx : réforme contre révolution
Michel Onfray oppose la logique marxiste du changement radical par la lutte des classes et la dictature du prolétariat à la démarche réformiste de Mill. Selon Marx, le changement de l'infrastructure économique détermine la transformation des idées et des mœurs. Mill, en revanche, refuse cette vision mécanique. Il considère que l'individu, par éducation et développement personnel, peut être l'agent du progrès, sans passer par la révolution violente. Pour Mill, la justice sociale passe par la correction du libéralisme et non par son abolition.
3. L’importance de l’individu : un antidote à la tyrannie de la majorité
Mill constate une menace majeure dans la société moderne : la tyrannie de la majorité, renforcée par l’opinion publique, les médias (déjà puissants à l’époque) et l’uniformisation induite par le capitalisme et les nouvelles technologies (comme le chemin de fer). Il défend la nécessité de préserver des individualités fortes, capables de résister à cette standardisation. Ce souci rejoint l’idée du dandysme chez Baudelaire, qu'Onfray rapproche de Mill : cultiver sa singularité pour échapper à la vulgarité du temps.
4. La liberté : droits et devoirs
Mill affirme une définition rigoureuse de la liberté individuelle : chacun doit pouvoir faire ce qu’il veut tant qu'il ne nuit pas à autrui. Il insiste sur l’équilibre entre droits et devoirs, condition essentielle pour une société libre et juste. Sa défense absolue de la liberté de conscience, d’expression et d’action, tout en posant la limite du respect d’autrui, en fait un penseur à la croisée du libéralisme politique et du libertarisme, influençant également les courants anarchistes de son temps.
5. Un socialisme tempéré et humaniste
Contre l’image d’un Mill uniquement libéral, Onfray souligne ses positions clairement socialistes et réformistes :
* Éducation pour tous, sans monopole étatique dogmatique.
* Réformes démocratiques, suffrage universel incluant les femmes, véritable représentativité politique.
* Rôle protecteur de l’État, garantissant une justice sociale et limitant les excès du capitalisme.
* Redistribution des richesses, nationalisation du sous-sol, taxation des produits nuisibles, participation des travailleurs aux bénéfices.
* Contrôle des naissances et défense des droits des femmes, culminant dans son ouvrage L’asservissement des femmes, où il prône une égalité totale.
Pour Mill, le progrès social repose sur la combinaison d’une justice économique, d’une liberté individuelle préservée, et de l’éducation des consciences.
💡 Conclusion
John Stuart Mill développe une pensée singulière qui concilie liberté individuelle, justice sociale et réforme démocratique. Contre le libéralisme économique débridé et les solutions révolutionnaires radicales, il propose une voie intermédiaire : un socialisme tempéré, fondé sur l’éducation, la redistribution et le respect des libertés fondamentales. Son attachement à l’individu comme moteur du progrès, allié à une réflexion profonde sur les dangers de l’uniformisation, en fait un penseur toujours d’actualité.
📚 Philosophes et concepts mentionnés
* Platon (env. 428-348 av. J.-C.) – Philosophe grec, théoricien du bien absolu.
* Socrate (env. 470-399 av. J.-C.) – Philosophe grec, symbole du questionnement éthique.
* Épicure (341-270 av. J.-C.) – Philosophe grec, fondateur de l’hédonisme modéré.
* Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) – Philosophe des Lumières, théoricien du contrat social.
* Adam Smith (1723-1790) – Économiste écossais, figure du libéralisme économique.
* Jeremy Bentham (1748-1832) – Philosophe britannique, père de l’utilitarisme quantitatif.
* Auguste Comte (1798-1857) – Philosophe positiviste, défenseur du progrès par la science.
* Alexis de Tocqueville (1805-1859) – Philosophe et sociologue français, auteur de La Démocratie en Amérique.
* John Stuart Mill (1806 – 1873) — Philosophe et économiste britannique, représentant majeur de l'utilitarisme et du libéralisme au XIXᵉ siècle.
* Karl Marx (1818-1883) – Philosophe allemand, théoricien du communisme et du matérialisme historique.
* Baudelaire (1821-1867) – Poète français, théoricien du dandysme.
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1. Introduction
Dans cette conférence, Michel Onfray approfondit l’analyse de John Stuart Mill, en mettant en lumière les différences fondamentales entre son utilitarisme et celui de Bentham. Contrairement à une idée répandue, Mill ne se contente pas de prolonger la pensée de son prédécesseur ; il la corrige, la raffine et la transforme. Sa vision de l’hédonisme et de l’utilitarisme s’éloigne du simple calcul quantitatif du plaisir pour proposer un hédonisme qualitatif, plus soucieux de la dignité humaine, de l’éthique et de la justice sociale.
2. L’opposition entre Bentham et Mill : quantité contre qualité
Bentham conçoit l’hédonisme en termes quantitatifs : la morale se résume à maximiser le plaisir et minimiser la douleur, sans différenciation entre les plaisirs. Mill rejette cette approche et affirme qu’il existe des plaisirs supérieurs et inférieurs, basés sur leur valeur intellectuelle, morale et émotionnelle :
* Bentham : "Tous les plaisirs se valent s’ils procurent la même intensité de satisfaction."
* Mill : "Il vaut mieux être un homme insatisfait qu’un porc satisfait. Il vaut mieux être Socrate insatisfait qu’un imbécile satisfait."
Cette hiérarchie des plaisirs introduit un critère de qualité : les plaisirs intellectuels (art, philosophie, musique, etc.) sont plus nobles que les plaisirs purement sensoriels.
3. De l’égoïsme utilitariste à l’altruisme moral
Une autre divergence majeure entre Mill et Bentham concerne l’éthique du plaisir :
* Bentham : L’homme doit chercher son plaisir personnel en priorité, et l’addition des plaisirs individuels constituera le bonheur collectif.
* Mill : Le bonheur ne peut être recherché directement ; il est une conséquence de l’altruisme. Ce n’est qu’en œuvrant pour le bien des autres qu’on trouve son propre bonheur.
Cette approche fait de Mill un penseur moins égoïste et plus social. Il insiste sur l’importance de l’éducation morale, qui permet d’apprendre à rechercher des plaisirs élevés et à intégrer l’intérêt collectif dans ses choix.
4. Un socialisme tempéré face au libéralisme radical
Alors que Bentham reste attaché à une vision libérale stricte, Mill développe un "socialisme tempéré", qui n’exclut pas l’intervention de l’État pour garantir une répartition plus juste des richesses et des opportunités. Il défend :
* Un État protecteur des individus contre les abus du capitalisme.
* Une régulation du marché pour éviter l’exploitation des plus faibles.
* Le droit de vote pour les femmes et les classes laborieuses.
Ce positionnement lui vaut d’être récupéré par les libéraux, qui cherchent à minimiser son engagement socialiste, alors qu’il constitue une rupture claire avec l’individualisme pur de Bentham.
5. L’utilitarisme sans Dieu : une éthique immanente
Mill rejette toute justification religieuse de la morale. Contrairement aux doctrines chrétiennes qui fondent la morale sur un ordre divin, il pense que l’éthique repose sur une analyse rationnelle du bien et du mal, en fonction des conséquences des actions. Cette approche le rapproche du conséquentialisme, où :
* Une action est bonne si elle produit plus de bonheur que de souffrance.
* Une action est mauvaise si elle nuit au bien-être général.
Cependant, Mill ne tombe pas dans un relativisme total : il maintient que certains principes (justice, liberté, équité) sont essentiels et universels.
6. La critique de Bentham et la construction d’un utilitarisme humaniste
Dans son Essai sur Bentham (1838), Mill critique sévèrement son prédécesseur :
* Bentham néglige l’histoire et la culture : il ignore les apports des philosophes antérieurs.
* Sa vision est trop mécanique : il réduit la morale à un simple calcul mathématique des plaisirs.
* Il méconnaît la nature humaine : il suppose que tous les individus sont rationnels et recherchent spontanément leur intérêt bien compris, ce qui est faux.
Mill construit alors un utilitarisme plus souple et plus adapté à la réalité humaine, qui prend en compte les sentiments, la culture et l’éducation.
💡 Conclusion
John Stuart Mill réinvente l’utilitarisme en le libérant de l’approche quantitative et mécanique de Bentham. Il affirme que tous les plaisirs ne se valent pas et introduit une hiérarchie des plaisirs, privilégiant les plaisirs intellectuels et moraux. Son utilitarisme devient altruiste et social, rejetant l’égoïsme benthamien au profit d’une recherche du bien collectif.
Cette vision le rapproche d’un socialisme tempéré, où l’État joue un rôle de protection face aux excès du capitalisme. Son éthique, fondée sur la justice et la liberté, marque une rupture avec le libéralisme pur et ouvre la voie à un utilitarisme humaniste et progressiste.
Loin d’être un simple héritier de Bentham, John Stuart Mill propose une transformation radicale de l’utilitarisme, en y intégrant des éléments d’altruisme, de justice sociale et de culture morale. Son œuvre marque ainsi une rupture avec le libéralisme pur et préfigure une vision plus humaniste et progressiste de l’éthique et de la politique.
📚 Philosophes et concepts mentionnés
* Socrate (env. 470-399 av. J.-C.) – Philosophe grec, défenseur du questionnement éthique et de la recherche de la vérité.
* Platon (env. 428-348 av. J.-C.) – Philosophe grec, théoricien du bien absolu et des idées supérieures.
* Épicure (341-270 av. J.-C.) – Philosophe grec, fondateur de l’hédonisme modéré et du plaisir réfléchi.
* Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) – Philosophe français, défenseur de la nature et de la souveraineté populaire.
* Jeremy Bentham (1748-1832) – Philosophe britannique, père de l’utilitarisme quantitatif.
* Emmanuel Kant (1724-1804) – Philosophe allemand, défenseur de l’impératif catégorique et du devoir moral absolu.
* John Stuart Mill (1806 – 1873) — Philosophe et économiste britannique, représentant majeur de l'utilitarisme et du libéralisme au XIXᵉ siècle.
* Pierre-Joseph Proudhon (1809-1865) – Philosophe anarchiste français, critique du capitalisme et du libéralisme.
* Karl Marx (1818-1883) – Philosophe et économiste allemand, théoricien du communisme.
* Pierre Kropotkine (1842-1921) – Philosophe anarchiste russe, défenseur de la coopération et de l’entraide sociale.
Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie
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1. Introduction
Michel Onfray entame son analyse de John Stuart Mill, figure majeure du XIXe siècle, en s’intéressant à son autobiographie et à la manière dont sa pensée s’est construite dans un contexte familial rigide. Contrairement à ce que l’on croit souvent, Mill n’est pas un simple disciple de Bentham ni un pur défenseur du libéralisme. Il développe une pensée plus nuancée, qui se détache progressivement de l’utilitarisme orthodoxe pour intégrer une dimension romantique et humaniste.
2. Une enfance sous le signe de l’excellence
John Stuart Mill naît à Londres en 1806, fils de James Mill, philosophe et économiste utilitariste, proche de Jeremy Bentham. Son éducation est extrêmement stricte et précoce :
* À 3 ans, il apprend le grec, puis le latin à 8 ans.
* À 7 ans, il lit l’Iliade et les dialogues de Platon.
* À 12 ans, il étudie la logique d’Aristote et la scolastique médiévale.
Ce programme intensif, voulu par son père, vise à former un génie. Mill est tenu à l’écart des autres enfants et est totalement privé d’affection maternelle. Son quotidien est une alternance de lectures et d’exercices intellectuels, ce qui forge un cerveau exceptionnel, mais une personnalité rigide et isolée.
3. Une adolescence marquée par l’influence de Bentham et de l’utilitarisme
Adolescent, Mill est intégré aux cercles intellectuels de son père et de Bentham. Il est initié à l’économie politique, à la philosophie empiriste (Locke, Condillac, Helvétius) et à la logique. Il participe même à l’édition des œuvres de Bentham, contribuant à structurer la pensée utilitariste.
Cependant, il commence à percevoir les limites de cette doctrine. Inspiré par Condorcet, il constate que l’utilitarisme benthamien est un système fermé, quasi sectaire, qui ne laisse pas place aux nuances et à l’individualité. Cette première fissure dans son adhésion totale au libéralisme va bientôt s’élargir.
4. Une crise existentielle et la découverte du romantisme
À 20 ans, Mill traverse une dépression nerveuse qui remet en question l’ensemble de son éducation et de ses certitudes philosophiques. La cause de cette crise est une révélation brutale :
Si toutes les réformes que je désire étaient accomplies, serais-je heureux ? La réponse fut non.
Il prend alors conscience que le bonheur ne se réduit pas à un calcul rationnel et qu’un système purement utilitariste ne peut suffire à combler une existence. Il se tourne alors vers la poésie romantique et la culture du sentiment :
* La lecture de Wordsworth et d’autres poètes lui ouvre une nouvelle sensibilité.
* Il découvre le sublime, cette émotion qui dépasse la raison pure.
* Il comprend que l’art et la littérature sont essentiels à la vie humaine.
Ce moment marque son émancipation progressive du benthamisme et le début d’une philosophie plus humaniste et sensible.
5. La rencontre avec Harriet Taylor : une révolution intellectuelle et sentimentale
En 1830, Mill rencontre Harriet Taylor, une femme mariée avec qui il noue une relation intellectuelle et amoureuse passionnée. Pendant 20 ans, leur relation reste platonique, mais elle transforme profondément la pensée de Mill :
* Il s’intéresse au féminisme et à la question de l’égalité des sexes.
* Il adopte une vision plus socialiste et critique du libéralisme.
* Il rejette le calcul froid de l’utilitarisme pour une approche plus morale et humaine.
Lorsque le mari d’Harriet meurt, Mill l’épouse en 1851. Leur collaboration influence ses écrits majeurs, notamment De la liberté (1859) et L’assujettissement des femmes (1869).
6. Une philosophie politique entre libéralisme et socialisme
Mill développe un socialisme tempéré, refusant à la fois le laissez-faire absolu du libéralisme et les excès du marxisme. Il prône :
* Une régulation de l’économie pour éviter la misère générée par le capitalisme.
* Un État garant des libertés, qui protège les individus sans étouffer leur initiative.
* Un droit de vote élargi aux femmes et aux classes populaires.
Élu député en 1865, il défend des causes progressistes, notamment l’abolition de l’esclavage et les droits des femmes. Sa pensée reste un compromis entre liberté individuelle et justice sociale, influencé par son héritage utilitariste mais enrichi par son évolution romantique.
💡 Conclusion
John Stuart Mill, bien loin d’être un simple disciple de Bentham, incarne une pensée plus complexe et nuancée. Son éducation rigide et son conditionnement intellectuel ont fait de lui un prodige précoce, mais aussi un homme profondément marqué par une crise existentielle qui l’a conduit à remettre en question l’utilitarisme orthodoxe.
Son émancipation passe par la découverte du romantisme, de la poésie et de l’importance des sentiments, éléments absents chez Bentham. Sa rencontre avec Harriet Taylor joue un rôle déterminant dans sa transformation, l’amenant à développer un féminisme engagé et une approche du socialisme tempéré.
Mill ne rejette pas l’utilitarisme mais le repense en intégrant une dimension humaine et altruiste, cherchant non plus un bonheur individuel immédiat, mais un idéal fondé sur l’amélioration de la condition collective et la justice sociale. Son engagement en faveur du suffrage universel, des droits des femmes et des classes laborieuses témoigne de son évolution vers une philosophie de la liberté équilibrée par des principes d’équité et de solidarité.
📚 Philosophes et concepts mentionnés
* Saint Augustin (354-430) – Philosophe et théologien chrétien, auteur des Confessions, précurseur de l’autobiographie philosophique.
* Michel de Montaigne (1533-1592) – Philosophe français, auteur des Essais, mettant en avant une réflexion introspective.
* Blaise Pascal (1623-1662) – Philosophe et scientifique français, critique du moi et de l’orgueil humain.
* John Locke (1632-1704) – Philosophe empiriste anglais, théoricien du libéralisme et de la connaissance par les sens.
* Étienne Bonnot de Condillac (1715-1780) – Philosophe sensualiste français, influencé par Locke.
* Claude-Adrien Helvétius (1715-1771) – Philosophe matérialiste et utilitariste, proche des Encyclopédistes.
* Jeremy Bentham (1748-1832) – Philosophe britannique, fondateur de l’utilitarisme.
* Jean-Baptiste Say (1767-1832) – Économiste français, défenseur du libéralisme économique.
* William Wordsworth (1770-1850) – Poète romantique anglais, célébrant la nature et les émotions.
* Auguste Comte (1798-1857) – Philosophe positiviste, influençant la pensée sociale de Mill.
* John Stuart Mill (1806 – 1873) — Philosophe et économiste britannique, représentant majeur de l'utilitarisme et du libéralisme au XIXᵉ siècle.
* Harriet Taylor Mill (1807-1858) – Féministe et intellectuelle anglaise, co-auteure de plusieurs idées de Mill.
* Karl Marx (1818-1883) – Philosophe allemand, théoricien du communisme, opposé au capitalisme libéral.
* Friedrich Nietzsche (1844-1900) – Philosophe allemand, critique des valeurs morales et du rationalisme.
Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie
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1. Introduction
Dans cette conférence, Michel Onfray conclut son analyse de Jérémy Bentham en explorant les fondements du libéralisme économique et de son utopie. Il s’attache à démontrer que, contrairement à une idée reçue, le libéralisme repose autant sur une vision utopique du monde que le socialisme. À travers Bentham, il revient sur les origines du libéralisme moderne et ses implications philosophiques, politiques et sociales.
2. Le libéralisme comme utopie
Onfray remet en cause l’idée selon laquelle le libéralisme serait pragmatique et réaliste, tandis que le socialisme serait une pure construction intellectuelle déconnectée du réel. Il démontre que le libéralisme repose sur des présupposés philosophiques et théologiques, notamment l'idée que la main invisible du marché génère un ordre naturel. Cette croyance est analogue à une théodicée où le marché joue le rôle d’une instance régulatrice quasi divine.
3. Bentham et la justification du libéralisme
Bentham est un théoricien du bonheur collectif qui postule que l’augmentation de la richesse des nations profite inévitablement aux individus qui la composent. Son raisonnement repose sur un axiome contestable : l’enrichissement d’une nation entraînerait mécaniquement celui de ses habitants. Or, Onfray souligne qu’en réalité, le libéralisme engendre la paupérisation, un phénomène où la concentration des richesses au sommet s’accompagne d’une augmentation de la misère.
4. L’économie libérale : un dogme et ses contradictions
Le libéralisme de Bentham repose sur une série de principes intangibles, parmi lesquels :
* La suppression des impôts et taxes pour favoriser l’économie.
* La dérégulation des marchés et l’abolition des protections sociales.
* La mise au travail de tous, y compris des femmes, enfants et invalides.
* L’éloge de la consommation et du luxe, censés stimuler l’économie.
* L’idée que le chômage est un phénomène passager, résolu par l’adaptabilité des travailleurs.
Ces principes restent identiques aujourd’hui et illustrent l’utopie libérale, qui considère que le marché s’autorégule et conduit inéluctablement à une société harmonieuse. Onfray met en évidence l’influence de cette pensée sur les politiques économiques contemporaines.
5. La paupérisation et la réponse libérale
Contrairement à ce que prétendent les libéraux, l’essor du capitalisme ne réduit pas la pauvreté mais l’intensifie. Onfray rappelle que dans l’Angleterre du XIXe siècle, le libéralisme entraîne :
* Le travail des enfants et des femmes dans des conditions inhumaines.
* L’explosion de la prostitution et de l’alcoolisme.
* Une pollution massive due à l’industrialisation sans contrôle.
* Un accroissement des inégalités sociales et de la mortalité infantile.
Face à cette situation, Bentham propose une solution disciplinaire et carcérale plutôt qu’une réponse sociale. Il suggère notamment :
* Un fichage des pauvres et des sans-abris afin de les contrôler.
* Un système de délation rémunérée, où les citoyens dénoncent les indigents aux autorités.
* L’extension du modèle carcéral à la société entière, avec une surveillance généralisée.
6. Le panoptique : contrôle et surveillance comme solutions
Bentham conçoit le panoptique, une prison circulaire où un seul gardien peut surveiller tous les détenus sans être vu. Ce modèle devient un paradigme du contrôle social, appliqué non seulement aux prisons mais aussi aux écoles, aux usines et aux hôpitaux. Onfray souligne que cette logique de surveillance et de discipline, théorisée par Michel Foucault, est toujours à l’œuvre dans nos sociétés contemporaines.
7. La critique des droits de l’homme
Bentham s’oppose aux droits de l’homme et à l’égalité juridique, considérant que ces principes entravent la liberté du marché. Il critique notamment :
* Le droit de résistance à l’oppression.
* L’imprescriptibilité des libertés fondamentales.
* L’idée d’une égalité naturelle entre les individus.
Pour lui, la loi et l’État doivent être réduits au strict minimum, se limitant à la police, l’armée et la collecte des impôts nécessaires au maintien de l’ordre.
💡 Conclusion
John Stuart Mill s’éloigne du libéralisme absolu en montrant qu’il repose sur une vision utopique du marché, censé s’autoréguler naturellement. Contrairement à Bentham, qui défend un capitalisme sans entrave, Mill prône un État régulateur pour protéger les plus vulnérables et éviter la paupérisation.
Son opposition au modèle disciplinaire de Bentham et sa critique du panoptique soulignent son attachement à la liberté et à la justice sociale. En intégrant une dimension morale et humaniste à son utilitarisme, Mill pose les bases d’un socialisme tempéré, conciliant progrès économique et protection sociale.
📚 Philosophes et concepts mentionnés
* Adam Smith (1723-1790) – Économiste écossais, père du libéralisme économique et de la théorie de la main invisible.
* Jeremy Bentham (1748-1832) – Philosophe britannique, théoricien de l’utilitarisme et du panoptique.
* Robert Owen (1771-1858) – Réformateur socialiste britannique, promoteur d’un socialisme coopératif.
* Charles Fourier (1772-1837) – Penseur utopiste français, défenseur d’un modèle social alternatif.
* Karl Marx (1818-1883) – Philosophe et économiste allemand, critique du capitalisme et théoricien du communisme.
* Mikhaïl Bakounine (1814-1876) – Philosophe anarchiste russe, opposé au capitalisme et à l’autorité étatique.
* Flora Tristan (1803-1844) – Féministe et socialiste française, témoin des conditions de vie ouvrières en Angleterre.
* Michel Foucault (1926-1984) – Philosophe français, auteur de Surveiller et punir, analyse du panoptique et du contrôle social.
Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie
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1. Introduction
Dans cette conférence de l’Université populaire, Michel Onfray poursuit son exploration de l’utilitarisme en s’intéressant à la manière dont Jeremy Bentham conçoit la morale hédoniste. Plus précisément, il s’agit de voir comment Bentham propose d’évaluer le plaisir et la vertu à l’aide de critères mesurables, une approche qui repose sur le principe du "thermomètre moral".
2. Bentham et la quantification du plaisir
Bentham considère que le plaisir peut être évalué objectivement selon six critères : intensité, durée, certitude, étendue, fécondité et pureté. Cette approche mathématique du plaisir permet, selon lui, de déterminer ce qui est moralement souhaitable. Cependant, Onfray critique cette vision en soulignant l’imprécision de Bentham sur la définition même du plaisir, ainsi que les limites de son raisonnement subjectif.
3. L’éthique conséquentialiste : une alternative au kantisme
Contrairement à Kant et à la tradition philosophique qui postule des valeurs absolues, Bentham adopte une approche conséquentialiste : il n’existe pas de bien et de mal intrinsèques, seule compte l’évaluation des conséquences d’un acte en fonction de l’augmentation ou la diminution du plaisir global. Ce pragmatisme heurte les traditions dogmatiques (Platon, Aristote, le christianisme) et pose la question de la pertinence du calcul rationnel appliqué à la morale.
4. La fabrication de la vertu : les quatre règles de Bentham
Bentham identifie quatre principes permettant de construire une vertu morale :
* La prudence personnelle, qui concerne la gestion de son propre plaisir.
* La prudence extra-personnelle, qui régit les relations avec autrui.
* La bienveillance effective négative, qui consiste à s’abstenir d’infliger du mal.
* La bienveillance effective positive, qui consiste à générer du plaisir chez autrui.
Onfray insiste sur l’importance du calcul dans cette éthique et critique l’idée que la bienveillance soit toujours récompensée en retour.
5. L’anticolonialisme cynique de Bentham
Bentham défend une position anticolonialiste non pas pour des raisons morales mais économiques : il considère que les colonies sont trop coûteuses à entretenir et qu’il vaut mieux s’en débarrasser pour favoriser la prospérité nationale. Cette posture utilitariste est mise en contraste avec celle de Condorcet, qui défend l’abolition de l’esclavage sur des bases républicaines et humanistes, mais dont la prudence politique retardera la mise en application.
6. Dépénalisation de l’homosexualité : un raisonnement juridique
Dans son "Essai sur la pédérastie" (1785), Bentham défend la dépénalisation de l’homosexualité, non par engagement progressiste, mais par refus des peines inutiles. Il argue que l’homosexualité ne nuit ni à la paix publique ni à la sécurité des individus et qu’elle contribue même à l’augmentation du plaisir global. Onfray souligne toutefois la confusion de Bentham entre homosexualité, bisexualité et pédérastie.
7. Les droits des animaux et l’éthique utilitariste
Bentham est l’un des premiers philosophes à inclure les animaux dans la réflexion morale, en affirmant qu’ils sont capables de plaisir et de souffrance. Il prône l’interdiction de la souffrance animale inutile, mais considère que leur mise à mort reste justifiable si elle est utile à l’homme. Son raisonnement influencera les penseurs modernes de la cause animale, notamment Peter Singer.
💡 Conclusion
Michel Onfray met en lumière la complexité et les contradictions de Bentham, partagé entre une éthique individualiste et une approche politique pragmatique. Loin d’être une pensée purement hédoniste, l’utilitarisme de Bentham se veut une tentative de rationalisation de la morale, qui repose toutefois sur des axiomes discutables. Son influence se retrouve dans des domaines variés, de l’abolition de l’esclavage à la question du droit des animaux.
📚 Philosophes et concepts mentionnés
* Platon (env. 428-348 av. J.-C.) – Philosophe grec, fondateur de la théorie des idées et défenseur du bien absolu.
* Aristote (384-322 av. J.-C.) – Philosophe grec, précurseur de l’éthique de la vertu.
* Socrate (env. 470-399 av. J.-C.) – Philosophe grec, maître de Platon, partisan du questionnement éthique.
* Emmanuel Kant (1724-1804) – Philosophe allemand, théoricien de l’impératif catégorique et du devoir moral absolu.
* Jeremy Bentham (1748-1832) – Philosophe britannique, fondateur de l’utilitarisme et du panoptique.
* Marcel Mauss (1872-1950) – Sociologue français, auteur de L’Essai sur le don, influençant la réflexion sur les échanges sociaux.
* Peter Singer (né en 1946) – Philosophe australien, promoteur du droit des animaux et de l’éthique utilitariste moderne.
Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie
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1. Introduction
Dans cet épisode, Michel Onfray poursuit son exploration de l’utilitarisme anglo-saxon, en particulier chez Jeremy Bentham et John Stuart Mill. Il interroge la manière dont cette philosophie a été reçue et perçue en France, souvent mal traduite et peu comprise. Onfray revient sur les malentendus entourant l’utilitarisme, notamment la mauvaise réputation du terme “utilité”, et critique la façon dont l’idéalisme allemand a dominé la philosophie continentale au détriment de cette tradition pragmatique.
2. L’utilitarisme : une pensée marginalisée en France
Pourquoi l’utilitarisme est-il mal vu ?
Onfray explique que l’utilitarisme souffre de plusieurs biais historiques :
* Le rejet du terme “utilité”, souvent réduit à une vision triviale et matérialiste.
* L’hégémonie de la philosophie idéaliste allemande en France, notamment via Victor Cousin, qui a imposé une tradition anti-matérialiste et conservatrice.
* L’influence marxiste, qui a caricaturé l’utilitarisme comme une philosophie bourgeoise centrée sur le profit.
Un courant anglo-saxon méconnu
Contrairement à la philosophie allemande, l’utilitarisme est pragmatique et empirique. Il se fonde sur l’observation des faits et cherche des solutions concrètes, ce qui le rend souvent incompatible avec les traditions philosophiques abstraites et spéculatives qui ont dominé le continent européen.
3. Bentham et la question du plaisir
Une vision quantitative du plaisir
Bentham considère que tous les plaisirs se valent, tant qu’ils produisent du bien-être. Il écrit : « Préjugé à part, le jeu d’épingle, à plaisir égal, vaut la poésie. » Cela signifie que :
* Il n’y a pas de hiérarchie entre les plaisirs intellectuels et physiques.
* Un plaisir simple (comme jouer à un jeu d’épingle) a autant de valeur qu’une expérience artistique.
* Ce qui compte est la quantité de plaisir produit, et non sa nature.
Une critique par Stuart Mill
John Stuart Mill contestera cette vision trop mécanique du plaisir en insistant sur une distinction entre plaisirs supérieurs et inférieurs. Il soutiendra qu’il vaut mieux être Socrate insatisfait qu’un imbécile satisfait, introduisant ainsi une dimension qualitative dans l’utilitarisme.
4. L’héritage ambigu de l’utilitarisme
Une pensée influente, mais controversée
Onfray rappelle que l’utilitarisme a influencé :
* La politique publique (calcul coûts-bénéfices, justice sociale).
* Les sciences économiques et la théorie du marché.
* Les débats éthiques contemporains, notamment sur l’euthanasie, l’expérimentation animale et la bioéthique.
Cependant, cette pensée a aussi été caricaturée comme une justification du libéralisme économique et du pragmatisme froid, alors qu’elle visait avant tout le bien-être collectif.
Une opposition persistante avec la philosophie continentale
L’opposition entre philosophie anglo-saxonne et continentale se reflète encore aujourd’hui dans :
* Le rejet du pragmatisme en France, où la philosophie reste largement spéculative.
* La domination des héritages kantien et hégélien, qui privilégient une vision abstraite de la morale.
* La réticence à voir l’éthique comme une science expérimentale, ce que proposaient Bentham et Mill.
💡 Conclusion
Michel Onfray met en lumière la marginalisation de l’utilitarisme en France, victime de préjugés et de malentendus historiques. Il souligne l’importance de réhabiliter cette pensée pragmatique, qui propose une approche rationnelle et empirique de la morale, plutôt que des abstractions dogmatiques.
📚 Philosophes mentionnés
* Platon (env. 428 av. J.-C. – 348 av. J.-C.) — Philosophe idéaliste, influençant la pensée politique.
* Épicure (341 av. J.-C. – 270 av. J.-C.) — Philosophe matérialiste et hédoniste.
* Lucrèce (env. 94 av. J.-C. – env. 55 av. J.-C.) — Poète et philosophe épicurien.
* Pierre Gassendi (1592 – 1655) — Philosophe empiriste et matérialiste.
* René Descartes (1596 – 1650) — Philosophe rationaliste, défenseur du dualisme.
* Baruch Spinoza (1632 – 1677) — Philosophe rationaliste et panthéiste.
* Jean-Jacques Rousseau (1712 – 1778) — Philosophe des Lumières, théoricien du contrat social.
* Claude-Adrien Helvétius (1715 – 1771) — Philosophe des Lumières, théoricien du bonheur collectif.
* Paul-Henri Thiry d’Holbach (1723 – 1789) — Philosophe matérialiste, critique du christianisme et défenseur d’une éthique rationaliste.
* Jeremy Bentham (1748 – 1832) — Philosophe et juriste anglais, fondateur de l’utilitarisme moderne.
* William Godwin (1756 – 1836) — Philosophe et écrivain britannique, associé au proto-anarchisme et au rationalisme utilitariste.
* Victor Cousin (1792 – 1867) — Philosophe français, promoteur de l’idéalisme hégélien en France.
* John Stuart Mill (1806 – 1873) — Philosophe utilitariste et libéral.
* Karl Marx (1818 – 1883) — Philosophe et économiste, critique du capitalisme.
* Friedrich Nietzsche (1844 – 1900) — Philosophe allemand, critique du rationalisme et du christianisme.
* Gilles Deleuze (1925 – 1995) — Philosophe français, auteur de Le Pli. Leibniz et le baroque.
* Michel Foucault (1926 – 1984) — Philosophe français, historien des systèmes de pensée.
Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie
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1. Introduction
Dans cet épisode, Michel Onfray poursuit son étude de l’utilitarisme anglo-saxon en abordant Jeremy Bentham, philosophe fondateur de cette doctrine. Il montre comment Bentham systématise l’idée de l’optimisation du plaisir et de la minimisation de la douleur, tout en développant une vision libérale et rationaliste de la société. Onfray souligne aussi les paradoxes de Bentham et la difficulté d’accès à son œuvre, encore aujourd’hui partiellement inédite.
2. Un penseur méconnu mais fondamental
Bentham : une figure floue du libéralisme
Contrairement à des penseurs comme Hegel, Bentham est peu étudié en France. Son œuvre est mal traduite et peu accessible, ce qui explique qu’il soit souvent réduit à quelques idées simplistes.
Un philosophe du XVIIIe siècle dans un monde industriel
Bentham naît en 1748, à une époque où l’Angleterre connaît une mutation profonde avec la Révolution industrielle. Il s’inscrit dans un contexte où le libéralisme économique et politique prend son essor, influencé par :
* Le matérialisme du XVIIIe siècle (Helvétius, d’Holbach).
* L’essor de l’économie politique (Adam Smith).
* Une approche scientifique du droit et de l’éthique.
3. L’utilitarisme : une éthique du calcul
Maximiser le bonheur, minimiser la douleur
Bentham développe une éthique basée sur l’arithmétique des plaisirs, inspirée par Maupertuis et Helvétius. Son principe central est le plus grand bonheur du plus grand nombre, qui devient un critère d’évaluation pour toute action morale et politique.
Une conception radicale du droit et de la société
Bentham rejette les fondements traditionnels du droit et propose :
* Une codification rationnelle des lois pour garantir leur utilité.
* Une critique de la Déclaration des droits de l’homme, qu’il considère comme une abstraction inefficace.
* Une approche pragmatique de la justice, où la peine doit être proportionnelle au bénéfice social qu’elle engendre.
4. Le panoptique : une société sous surveillance
Une prison idéale ou une dystopie ?
Bentham imagine le panoptique, un modèle de prison où un seul gardien peut observer tous les détenus sans être vu. Ce système repose sur l’intériorisation de la surveillance, forçant les prisonniers à s’auto-discipliner.
Une vision préfigurant les sociétés modernes
Onfray met en perspective le panoptique avec :
* Les systèmes de contrôle contemporains (caméras de surveillance, traçage numérique).
* L’analyse de Michel Foucault dans Surveiller et punir, qui voit dans le panoptique un modèle généralisable à toute la société.
* Une rationalisation de la discipline, qui pose la question de l’impact de l’utilitarisme sur les libertés individuelles.
5. Une philosophie tournée vers l’efficacité
L’héritage utilitariste
Bentham influence directement :
* John Stuart Mill, qui reprendra l’utilitarisme en lui ajoutant des nuances libérales et humanistes.
* Les doctrines économiques contemporaines, notamment dans l’évaluation des politiques publiques.
* Les débats sur l’éthique appliquée, comme la bioéthique ou la politique pénale.
Une pensée sans morale transcendante
Onfray insiste sur le fait que l’utilitarisme de Bentham ne repose sur aucun fondement religieux ou métaphysique. Tout se réduit à des conséquences mesurables, ce qui le distingue radicalement des morales classiques (kantienne, chrétienne).
💡 Conclusion
Michel Onfray présente Bentham comme un philosophe fondamental mais méconnu, dont l’héritage façonne encore nos sociétés modernes. Il met en évidence les limites et les dangers de l’utilitarisme, notamment dans son application aux systèmes de contrôle et de surveillance.
📚 Philosophes mentionnés
* Platon (env. 428 av. J.-C. – 348 av. J.-C.) — Philosophe idéaliste, influençant la pensée politique.
* Épicure (341 av. J.-C. – 270 av. J.-C.) — Philosophe matérialiste et hédoniste.
* Lucrèce (env. 94 av. J.-C. – env. 55 av. J.-C.) — Poète et philosophe épicurien.
* Pierre Gassendi (1592 – 1655) — Philosophe empiriste et matérialiste.
* René Descartes (1596 – 1650) — Philosophe rationaliste, défenseur du dualisme.
* Baruch Spinoza (1632 – 1677) — Philosophe rationaliste et panthéiste.
* Jean-Jacques Rousseau (1712 – 1778) — Philosophe des Lumières, théoricien du contrat social.
* Claude-Adrien Helvétius (1715 – 1771) — Philosophe des Lumières, théoricien du bonheur collectif.
* Paul-Henri Thiry d’Holbach (1723 – 1789) — Philosophe matérialiste, critique du christianisme et défenseur d’une éthique rationaliste.
* Jeremy Bentham (1748 – 1832) — Philosophe et juriste anglais, fondateur de l’utilitarisme moderne.
* William Godwin (1756 – 1836) — Philosophe et écrivain britannique, associé au proto-anarchisme et au rationalisme utilitariste.
* John Stuart Mill (1806 – 1873) — Philosophe utilitariste et libéral.
* Karl Marx (1818 – 1883) — Philosophe et économiste, critique du capitalisme.
* Friedrich Nietzsche (1844 – 1900) — Philosophe allemand, critique du rationalisme et du christianisme.
* Gilles Deleuze (1925 – 1995) — Philosophe français, auteur de Le Pli. Leibniz et le baroque.
* Michel Foucault (1926 – 1984) — Philosophe français, historien des systèmes de pensée.
Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie
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1. Introduction
Dans cet épisode, Michel Onfray approfondit sa critique de William Godwin, en particulier sur les limites et les paradoxes de son utilitarisme. Il illustre cette critique par l’anecdote du valet de Fénelon, qui met en lumière la conception radicale de l’utilité sociale chez Godwin. En parallèle, Onfray oppose l’utilitarisme anglo-saxon à l’éthique kantienne, révélant ainsi deux visions fondamentalement opposées de la morale.
2. Godwin et la morale conséquentialiste
L’opposition entre utilitarisme et déontologie
Onfray rappelle que l’utilitarisme repose sur deux principes fondamentaux :
* Le relativisme moral : il n’existe pas de bien ou de mal absolu, tout dépend du contexte et des conséquences.
* Le conséquentialisme : une action est bonne ou mauvaise en fonction de ses résultats.
À l’inverse, Kant défend une morale absolue, où certaines actions (comme le mensonge) sont toujours interdites, quelles que soient les circonstances.
L’exemple de la promesse
Godwin applique son utilitarisme à la question de la promesse :
* Pour Kant, une promesse doit toujours être tenue, car ne pas la respecter détruirait la confiance et la source du droit.
* Pour Godwin, une promesse n’a de valeur que si elle est utile à l’intérêt général. Si la rompre sert un bien supérieur, elle doit être violée.
3. L’anecdote du valet de Fénelon : une morale froide et calculatrice
Le dilemme moral
Godwin pose un cas hypothétique :
* Un incendie éclate dans un château.
* Deux personnes sont en danger : Fénelon, philosophe et auteur du Télémaque, et son valet, un homme ordinaire.
* Il faut choisir qui sauver.
La logique utilitariste de Godwin
Godwin affirme qu’il faut sauver Fénelon plutôt que son valet, car :
* Fénelon a plus de valeur pour la société en raison de son œuvre et de son influence.
* Le valet est remplaçable, car n’importe qui peut accomplir ses tâches domestiques.
* L’utilité sociale prime sur l’égalité ontologique.
Un raisonnement contesté
Onfray critique cette vision, soulignant qu’elle :
* Justifie une hiérarchie entre les êtres humains en fonction de leur utilité sociale.
* Écarte toute considération humaniste, où chaque vie devrait avoir la même valeur.
* Préfigure certaines dérives totalitaires, où l’individu est sacrifié au nom d’un prétendu bien commun.
4. L’impact de l’utilitarisme sur la pensée moderne
De Godwin à Bentham et Mill
Onfray montre que Godwin préfigure l’utilitarisme moderne, repris et systématisé par :
* Jeremy Bentham, avec sa théorie du plus grand bonheur du plus grand nombre.
* John Stuart Mill, qui nuance l’approche en intégrant des valeurs libérales et humanistes.
Un débat encore d’actualité
L’opposition entre utilitarisme et éthique déontologique continue d’animer les débats contemporains :
* En bioéthique, sur des sujets comme l’euthanasie ou le tri des patients en médecine.
* En philosophie politique, sur la balance entre sécurité collective et libertés individuelles.
5. Une critique de la vision absolutiste de l’utilité
L’utilité peut-elle justifier toutes les actions ?
Onfray met en garde contre les dérives potentielles de l’utilitarisme radical :
* L’idée qu’un individu a moins de valeur qu’un autre peut mener à des discriminations systémiques.
* La notion d’intérêt général est souvent définie par ceux qui détiennent le pouvoir, ce qui pose la question de son objectivité.
* Un monde fondé uniquement sur l’utilité risque de devenir froid et mécanique, déshumanisant les relations sociales.
L’importance d’une éthique équilibrée
Onfray propose une approche plus nuancée :
* Reconnaître l’importance des conséquences, sans tomber dans un cynisme total.
* Intégrer une dimension humaniste, qui préserve la dignité de chaque individu.
* Ne pas sacrifier les principes moraux au nom d’un hypothétique bien collectif.
💡 Conclusion
Michel Onfray utilise l’anecdote du valet de Fénelon pour illustrer les limites de l’utilitarisme de Godwin et son potentiel danger moral. Il souligne la nécessité d’une approche éthique qui ne se limite pas à une froide rationalité, mais qui intègre des valeurs humanistes et un respect égalitaire des individus.
📚 Philosophes mentionnés
* Platon (env. 428 av. J.-C. – 348 av. J.-C.) — Philosophe idéaliste, influençant la pensée politique.
* Épicure (341 av. J.-C. – 270 av. J.-C.) — Philosophe matérialiste et hédoniste.
* Lucrèce (env. 94 av. J.-C. – env. 55 av. J.-C.) — Poète et philosophe épicurien.
* Pierre Gassendi (1592 – 1655) — Philosophe empiriste et matérialiste.
* René Descartes (1596 – 1650) — Philosophe rationaliste, défenseur du dualisme.
* Baruch Spinoza (1632 – 1677) — Philosophe rationaliste et panthéiste.
* Jean-Jacques Rousseau (1712 – 1778) — Philosophe des Lumières, théoricien du contrat social.
* Claude-Adrien Helvétius (1715 – 1771) — Philosophe des Lumières, théoricien du bonheur collectif.
* Paul-Henri Thiry d’Holbach (1723 – 1789) — Philosophe matérialiste, critique du christianisme et défenseur d’une éthique rationaliste.
* Immanuel Kant (1724 – 1804) — Philosophe idéaliste, fondateur de la morale déontologique.
* Jeremy Bentham (1748 – 1832) — Fondateur de l’utilitarisme moderne.
* William Godwin (1756 – 1836) — Philosophe et écrivain britannique, associé au proto-anarchisme et au rationalisme utilitariste.
* John Stuart Mill (1806 – 1873) — Philosophe utilitariste et libéral.
* Friedrich Nietzsche (1844 – 1900) — Philosophe allemand, critique du rationalisme et du christianisme.
* Gilles Deleuze (1925 – 1995) — Philosophe français, auteur de Le Pli. Leibniz et le baroque.
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1. Introduction
Dans cet épisode, Michel Onfray poursuit son analyse de William Godwin en questionnant sa réelle filiation philosophique. Souvent présenté comme le père de l’anarchisme, Onfray remet en cause cette classification et suggère qu’il serait plus pertinent de voir en lui un précurseur de l’utilitarisme anglo-saxon. L’épisode explore ainsi la manière dont Godwin prépare le terrain pour Bentham et John Stuart Mill, plutôt que pour Bakounine ou Proudhon.
2. L’anarchisme : une constellation idéologique
Une définition complexe
Onfray insiste sur le fait que l’anarchisme n’est pas une doctrine monolithique. Il englobe :
* Des figures favorables à la violence (Bakounine) et d’autres prônant la non-violence (Sébastien Faure).
* Des penseurs collectivistes (Kropotkine) et des individualistes radicaux (Stirner).
* Des visions laïques (Reclus) et des courants chrétiens (Tolstoï).
Ainsi, coller l’étiquette anarchiste à Godwin semble abusif, car il n’adhère ni à la violence révolutionnaire ni à l’abolition radicale de l’État.
Godwin : un proto-anarchiste ?
Onfray admet qu’il y a chez Godwin des critiques de l’État et de l’autorité, ce qui pourrait le rapprocher de l’anarchisme. Toutefois, il ne prône pas la destruction immédiate du pouvoir mais plutôt une évolution progressive de la société par la raison et l’éducation. Cette approche le distingue des anarchistes classiques et le rapproche davantage d’un libéralisme utopique.
3. Godwin et l’héritage de l’utilitarisme
Un pont entre les Lumières et le XIXe siècle
Godwin se situe à un moment charnière entre la pensée des philosophes des Lumières et l’émergence des doctrines du XIXe siècle. Il reprend :
* L’éloge de la raison, hérité de Voltaire et Helvétius.
* L’idée de progrès linéaire, inspirée de Condorcet.
* Un rationalisme optimiste, annonçant Bentham et Mill.
Le conséquentialisme avant l’heure
Onfray insiste sur un point fondamental : Godwin développe un principe moral basé sur les conséquences des actes, ce qui le rapproche nettement de l’utilitarisme. Il écrit que la justice est un principe visant à maximiser le bonheur collectif, ce qui résonne avec la maxime de Bentham : le plus grand bonheur du plus grand nombre.
4. Une critique radicale du contrat social
Un rejet de Rousseau
Contrairement aux anarchistes qui s’inspireront de Rousseau, Godwin critique la notion de contrat social. Pour lui :
* Personne n’a jamais signé un tel contrat, c’est une fiction.
* L’État repose sur une illusion collective, qu’il faut dissiper par l’éducation.
* L’individu doit être autonome et non soumis à une volonté générale imposée.
Une confiance totale en la raison
Godwin pense que la vérité et la justice triompheront naturellement grâce à l’usage de la raison. Il s’oppose donc aux révolutionnaires violents, persuadé que la persuasion et l’éducation suffiront à transformer la société.
5. Une pensée entre deux traditions
Ni anarchiste, ni libéral classique
Si Godwin rejette l’État, il ne préconise pas non plus un retour à la propriété collective. Il se distingue des anarchistes par son refus de la violence et sa défense d’une évolution douce. Il se démarque aussi du libéralisme économique en critiquant les excès du capitalisme.
Un précurseur de l’utilitarisme moderne
Michel Onfray conclut que Godwin annonce plus l’utilitarisme que l’anarchisme. Son insistance sur les conséquences des actions, la rationalité et le bonheur collectif en fait un précurseur direct de Bentham et Mill, bien plus que de Proudhon ou Bakounine.
💡 Conclusion
Michel Onfray démonte le mythe de Godwin comme père de l’anarchisme et propose une lecture alternative : celle d’un réformateur progressiste dont la pensée s’inscrit dans la lignée de l’utilitarisme naissant. Il souligne ainsi l’importance de bien situer historiquement les penseurs pour éviter les raccourcis idéologiques.
📚 Philosophes mentionnés
* Platon (env. 428 av. J.-C. – 348 av. J.-C.) — Philosophe idéaliste, influençant la pensée politique.
* Diogène de Sinope (env. 412 av. J.-C. – 323 av. J.-C.) — Cynique, défenseur d’un mode de vie anti-autoritaire.
* Épicure (341 av. J.-C. – 270 av. J.-C.) — Philosophe matérialiste et hédoniste.
* Lucrèce (env. 94 av. J.-C. – env. 55 av. J.-C.) — Poète et philosophe épicurien.
* Pierre Gassendi (1592 – 1655) — Philosophe empiriste et matérialiste.
* René Descartes (1596 – 1650) — Philosophe rationaliste, défenseur du dualisme.
* Baruch Spinoza (1632 – 1677) — Philosophe rationaliste et panthéiste.
* Jean-Jacques Rousseau (1712 – 1778) — Philosophe des Lumières, théoricien du contrat social.
* Claude-Adrien Helvétius (1715 – 1771) — Philosophe des Lumières, théoricien du bonheur collectif.
* Paul-Henri Thiry d’Holbach (1723 – 1789) — Philosophe matérialiste, critique du christianisme et défenseur d’une éthique rationaliste.
* William Godwin (1756 – 1836) — Philosophe et écrivain britannique, associé au proto-anarchisme et au rationalisme utilitariste.
* Jeremy Bentham (1748 – 1832) — Fondateur de l’utilitarisme moderne.
* John Stuart Mill (1806 – 1873) — Philosophe utilitariste et libéral.
* Max Stirner (1806 – 1856) — Philosophe individualiste radical.
* Pierre-Joseph Proudhon (1809 – 1865) — Philosophe et théoricien du socialisme, critique du libéralisme.
* Mikhaïl Bakounine (1814 – 1876) — Philosophe anarchiste, opposant au marxisme.
* Friedrich Nietzsche (1844 – 1900) — Philosophe allemand, critique du rationalisme et du christianisme.
* Gilles Deleuze (1925 – 1995) — Philosophe français, auteur de Le Pli. Leibniz et le baroque.
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1. Introduction
Dans cet épisode, Michel Onfray revient sur William Godwin, une figure souvent associée à l’anarchisme, et sur l’influence de sa pensée sur sa fille Mary Shelley, l’auteure de Frankenstein. Il critique l’idée selon laquelle Godwin serait le véritable père de l’anarchisme et propose une analyse plus nuancée de son œuvre et de son héritage.
2. William Godwin : un anarchiste malgré lui ?
Une historiographie à revoir
Onfray souligne que l’histoire de la philosophie, et en particulier l’histoire de l’anarchisme, est souvent construite sur des préjugés et des simplifications. William Godwin est fréquemment présenté comme le précurseur de l’anarchisme, mais cette lecture mérite d’être nuancée.
Un calviniste avant tout ?
Plutôt qu’un anarchiste au sens moderne du terme, Godwin est un calviniste converti à une forme de messianisme révolutionnaire. Son éducation rigoriste, marquée par un prophétisme chrétien, a influencé sa vision du monde, où la transformation de la société est vue comme un progrès moral inévitable.
3. L’apport de Godwin : un anarchisme théorique
Une critique de l’État et du gouvernement
Dans Enquête sur la justice politique (1793), Godwin développe une pensée radicale sur l’État :
* Il rejette le pouvoir coercitif et toute forme d’autorité.
* Il prône un ordre social fondé sur la raison, où chaque individu agit en fonction de la justice et du bien commun.
* Il considère que l’éducation et la rationalité suffisent à organiser une société harmonieuse sans besoin de lois.
Les contradictions de sa pensée
Cependant, Onfray note plusieurs paradoxes :
* Godwin critique le mariage et la cohabitation, mais se marie et fonde une famille.
* Il rejette la propriété privée, mais vit dans un cadre bourgeois.
* Il considère l’éducation comme essentielle, tout en prônant un individualisme radical.
4. Mary Shelley et la figure de Frankenstein
Une influence intellectuelle marquée
Mary Shelley, la fille de Godwin, grandit dans un environnement intellectuel intense. Elle est influencée par les idées de son père, mais aussi par celles de sa mère, Mary Wollstonecraft, pionnière du féminisme.
Frankenstein : une métaphore du progrès et de ses dangers
Dans Frankenstein (1818), Mary Shelley exprime une critique de la science et du rationalisme excessif, héritée des débats philosophiques du XIXe siècle. Onfray y voit :
* Une mise en garde contre le scientisme et l’illusion du progrès absolu.
* Une réflexion sur les conséquences inattendues des idéologies radicales.
* Une allégorie de la créature abandonnée par son créateur, qui symbolise les dérives de la modernité.
5. Héritage et réception de Godwin
Un penseur mal compris ?
Si Godwin a influencé des penseurs comme Stirner, Bakounine ou Proudhon, Onfray insiste sur le fait que son œuvre est souvent instrumentalisée. Il reste avant tout un réformateur progressiste, plutôt qu’un révolutionnaire anarchiste.
Un pont entre le XVIIIe et le XIXe siècle
Godwin représente une transition entre les Lumières et les pensées radicales du XIXe siècle. Il pose des questions fondamentales sur l’État, la liberté et la morale, mais sa pensée demeure marquée par un héritage religieux et idéaliste.
💡 Conclusion
Michel Onfray propose une lecture critique de Godwin, en montrant qu’il est moins un anarchiste qu’un penseur réformiste influencé par le calvinisme et le rationalisme des Lumières. Il met également en lumière l’influence de son œuvre sur sa fille Mary Shelley, dont Frankenstein illustre les tensions entre progrès et humanité.
📚 Philosophes mentionnés
* Platon (env. 428 av. J.-C. – 348 av. J.-C.) — Philosophe idéaliste, influençant la pensée politique.
* Épicure (341 av. J.-C. – 270 av. J.-C.) — Philosophe matérialiste et hédoniste.
* Lucrèce (env. 94 av. J.-C. – env. 55 av. J.-C.) — Poète et philosophe épicurien.
* Pierre Gassendi (1592 – 1655) — Philosophe empiriste et matérialiste.
* René Descartes (1596 – 1650) — Philosophe rationaliste, défenseur du dualisme.
* Baruch Spinoza (1632 – 1677) — Philosophe rationaliste et panthéiste.
* Jean-Jacques Rousseau (1712 – 1778) — Philosophe des Lumières, théoricien du contrat social.
* Claude-Adrien Helvétius (1715 – 1771) — Philosophe des Lumières, théoricien du bonheur collectif.
* Paul-Henri Thiry d’Holbach (1723 – 1789) — Philosophe matérialiste, critique du christianisme et défenseur d’une éthique rationaliste.
* William Godwin (1756 – 1836) — Philosophe et écrivain britannique, associé au proto-anarchisme.
* Mary Wollstonecraft (1759 – 1797) — Pionnière du féminisme, épouse de Godwin et mère de Mary Shelley.
* Max Stirner (1806 – 1856) — Philosophe individualiste radical.
* Mikhaïl Bakounine (1814 – 1876) — Philosophe anarchiste, opposant au marxisme.
* Friedrich Nietzsche (1844 – 1900) — Philosophe allemand, critique du rationalisme et du christianisme.
* Gilles Deleuze (1925 – 1995) — Philosophe français, auteur de Le Pli. Leibniz et le baroque.
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1. Introduction
Dans cet épisode, Michel Onfray ouvre une nouvelle saison en abordant le XIXe siècle, souvent vu comme un siècle de progrès et d’idéaux, mais aussi qualifié de stupide par certains penseurs. Il s’appuie notamment sur Léon Daudet, qui en 1922 décrit le XIXe siècle comme un siècle de stupidité en raison de l’essor des idéologies socialistes, communistes et anarchistes. Onfray propose d’analyser les tensions idéologiques qui structurent ce siècle et qui aboutissent à la modernité.
2. Le XIXe siècle : un siècle de rupture et d’accélération
Un temps en mutation
Le XIXe siècle est marqué par une accélération sans précédent :
* Un basculement du temps cyclique au temps linéaire, dû à l’industrialisation.
* Une foi dans le progrès portée par les avancées technologiques et scientifiques.
* Une virtualisation du réel, avec l’invention du télégraphe, de la photographie et du cinéma.
Deux XIXe siècles
Onfray distingue deux forces antagonistes dans ce siècle :
* Un XIXe siècle des Lumières, qui prolonge les idéaux rationalistes et républicains de la Révolution française.
* Un XIXe siècle réactionnaire, qui prépare le XXe siècle en valorisant la nostalgie monarchique et le rejet de la modernité.
3. Le XIXe siècle : entre progrès et résistance
Un siècle du capitalisme et de ses contestations
Le XIXe siècle est celui de l’invention et de l’expansion du libéralisme économique. Il voit aussi naître les premières grandes contestations de ce modèle :
* Le socialisme (Robert Owen, Fourier, Proudhon)
* Le communisme (Karl Marx, Engels, Babeuf)
* L’anarchisme (Bakounine, Kropotkine)
Ces pensées visent à résister à l’industrialisation débridée et à la concentration des richesses.
La science et la technique au service de la domination
La révolution industrielle transforme radicalement le monde :
* Maîtrise des éléments : navigation à vapeur, aviation, premiers sous-marins.
* Colonialisme facilité par la motorisation des transports.
* Émergence du capitalisme industriel et de la production de masse.
Onfray montre comment ces transformations accélèrent les rapports de domination et créent de nouvelles formes d’exploitation.
4. Une relecture du XIXe siècle par la philosophie
Hegel et la justification du pouvoir
Onfray critique la manière dont Hegel est utilisé en France via Victor Cousin pour justifier l’ordre établi, en valorisant :
* L’État comme instance suprême.
* Le pouvoir des élites contre les forces révolutionnaires.
* Une philosophie de l’histoire téléologique, où l’État incarne le progrès inévitable.
La contestation libertaire et matérialiste
Face à cette hégémonie, certains philosophes opposent une pensée critique :
* Stirner, qui développe une vision radicale de l’individu.
* Bakounine, qui s’oppose à l’autorité étatique et à la bureaucratisation du socialisme.
* Flora Tristan, qui conjugue socialisme et féminisme.
5. Vers un XIXe siècle divisé
Une fracture entre deux visions du monde
Onfray met en évidence un clivage fondamental dans la philosophie du XIXe siècle :
* Les penseurs qui acceptent et justifient l’ordre dominant (Hegel, Cousin, les libéraux).
* Ceux qui cherchent à construire un nouvel ordre social (Marx, Proudhon, Bakounine).
Ce siècle est donc un laboratoire des tensions idéologiques, dont les héritages se retrouvent encore dans nos sociétés contemporaines.
💡 Conclusion
Michel Onfray propose une relecture du XIXe siècle comme un espace de conflit entre modernité et réaction, entre libéralisme et contestation sociale. Il s’agit d’un siècle charnière où se jouent les grandes batailles idéologiques qui influenceront le XXe siècle.
📚 Philosophes mentionnés
* Platon (env. 428 av. J.-C. – 348 av. J.-C.) — Philosophe idéaliste, influençant la pensée politique.
* Épicure (341 av. J.-C. – 270 av. J.-C.) — Philosophe matérialiste et hédoniste.
* Lucrèce (env. 94 av. J.-C. – env. 55 av. J.-C.) — Poète et philosophe épicurien.
* Pierre Gassendi (1592 – 1655) — Philosophe empiriste et matérialiste.
* René Descartes (1596 – 1650) — Philosophe rationaliste, défenseur du dualisme.
* Baruch Spinoza (1632 – 1677) — Philosophe rationaliste et panthéiste.
* Jean-Jacques Rousseau (1712 – 1778) — Philosophe des Lumières, théoricien du contrat social.
* Claude-Adrien Helvétius (1715 – 1771) — Philosophe des Lumières, théoricien du bonheur collectif.
* Paul-Henri Thiry d’Holbach (1723 – 1789) — Philosophe matérialiste, critique du christianisme et défenseur d’une éthique rationaliste.
* Georg Wilhelm Friedrich Hegel (1770 – 1831) — Philosophe idéaliste allemand, théoricien de l’État et de l’histoire.
* Flora Tristan (1803 – 1844) — Socialiste et féministe française, pionnière du syndicalisme.
* Max Stirner (1806 – 1856) — Philosophe individualiste radical.
* Karl Marx (1818 – 1883) — Philosophe, économiste et théoricien du communisme.
* Mikhaïl Bakounine (1814 – 1876) — Philosophe anarchiste, opposant au marxisme.
* Friedrich Nietzsche (1844 – 1900) — Philosophe allemand, critique du rationalisme et du christianisme.
* Gilles Deleuze (1925 – 1995) — Philosophe français, auteur de Le Pli. Leibniz et le baroque.
Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie
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1. Introduction
Dans cet épisode, Michel Onfray clôture son cycle en proposant une relecture critique de la Révolution française. Il met en évidence l’existence de deux révolutions : une révolution bourgeoise, qui a triomphé, et une révolution populaire, qui a été écrasée. Onfray déconstruit les récits officiels et analyse comment les historiographies successives ont occulté certains aspects fondamentaux de cet événement majeur.
2. Une révolution philosophique ou économique ?
Le mythe des philosophes précurseurs
Onfray s’attaque à l’idée largement répandue selon laquelle la Révolution française aurait été préparée par les philosophes des Lumières (Voltaire, Rousseau, Montesquieu, Diderot). Il remet en cause cette vision en soulignant que :
* La circulation des livres était limitée au XVIIIe siècle.
* Les romans populaires étaient plus lus que les traités philosophiques.
* L’association entre Lumières et Révolution est une construction rétrospective.
Un bouleversement économique avant tout
Plutôt qu’un triomphe des idées, Onfray insiste sur les tensions économiques qui ont conduit à la Révolution :
* Les mauvaises récoltes et la crise alimentaire ont exacerbé le mécontentement.
* Les revendications fiscales ont structuré les oppositions.
* La montée en puissance de la bourgeoisie marchande a cherché à se débarrasser des privilèges aristocratiques.
3. La victoire de la révolution bourgeoise
L’Assemblée nationale et la confiscation du pouvoir
Onfray explique comment la Révolution a été prise en main par la bourgeoisie montante, qui a rapidement évincé les forces populaires. Il met en avant :
* Les États généraux et la Déclaration des droits de l’homme, qui consacrent la primauté de la propriété privée.
* La loi Le Chapelier (1791), qui interdit les syndicats ouvriers et protège les intérêts des patrons.
* La répression des révoltes populaires, notamment contre les sans-culottes et les mouvements radicaux.
Robespierre : un bourgeois radical, pas un révolutionnaire social
Onfray critique l’image de Robespierre en révolutionnaire du peuple, en soulignant :
* Son attachement à l’ordre bourgeois.
* Son rôle dans la suppression des Hébertistes et des Enragés, les factions les plus radicales.
* Son culte de l’Être suprême, qui réintroduit une forme de religiosité d’État.
4. La révolution populaire écrasée
Les courants révolutionnaires radicaux
Onfray met en lumière des figures oubliées ou marginalisées :
* Les sans-culottes, qui prônaient une véritable démocratie sociale.
* Les Enragés, mouvement radical revendiquant l’égalité économique.
* Les féministes révolutionnaires, comme Olympe de Gouges et Claire Lacombe.
* Les Babouvistes, partisans d’une société égalitaire et collective.
La répression thermidorienne et le retour à l’ordre
Après la chute de Robespierre en 1794, la bourgeoisie triomphe définitivement :
* La suppression des mesures sociales prises sous la pression populaire.
* L’exécution ou la marginalisation des révolutionnaires radicaux.
* L’ascension de Napoléon, qui scelle la victoire d’une révolution conservatrice.
5. Une histoire réécrite par les vainqueurs
La construction du récit officiel
Onfray insiste sur la manière dont l’histoire a été écrite par les vainqueurs :
* La mise en avant de Voltaire et Rousseau comme figures fondatrices.
* L’oubli des penseurs et acteurs radicaux.
* La réduction de la Révolution à une victoire de la liberté et de la démocratie, alors qu’elle fut aussi un triomphe de la bourgeoisie capitaliste.
Vers une révolution inachevée ?
Selon Onfray, la Révolution française est un processus non achevé :
* La révolution politique a réussi, mais pas la révolution sociale.
* Les inégalités de classes persistent sous des formes renouvelées.
* La mémoire de la Révolution populaire reste occulte, servant de mythe mobilisateur à des luttes futures.
💡 Conclusion
Michel Onfray propose une relecture critique de la Révolution française en distinguant une révolution bourgeoise qui a triomphé et une révolution populaire qui a été écrasée. Il invite à repenser cet événement non comme un aboutissement, mais comme un combat inachevé, dont l’héritage continue de structurer les débats politiques contemporains.
📚 Philosophes mentionnés
* Platon (env. 428 av. J.-C. – 348 av. J.-C.) — Philosophe idéaliste, influençant la pensée politique.
* Épicure (341 av. J.-C. – 270 av. J.-C.) — Philosophe matérialiste et hédoniste.
* Lucrèce (env. 94 av. J.-C. – env. 55 av. J.-C.) — Poète et philosophe épicurien.
* Pierre Gassendi (1592 – 1655) — Philosophe empiriste et matérialiste.
* René Descartes (1596 – 1650) — Philosophe rationaliste, défenseur du dualisme.
* Baruch Spinoza (1632 – 1677) — Philosophe rationaliste et panthéiste.
* Jean-Jacques Rousseau (1712 – 1778) — Philosophe des Lumières, théoricien du contrat social.
* Claude-Adrien Helvétius (1715 – 1771) — Philosophe des Lumières, théoricien du bonheur collectif.
* Paul-Henri Thiry d’Holbach (1723 – 1789) — Philosophe matérialiste, critique du christianisme et défenseur d’une éthique rationaliste.
* Donatien Alphonse François de Sade (1740 – 1814) — Écrivain et philosophe matérialiste, partisan d’une vision féodale et radicale du pouvoir.
* Gracchus Babeuf (1760 – 1797) — Révolutionnaire radical, inspirateur du communisme.
* Friedrich Nietzsche (1844 – 1900) — Philosophe allemand, critique du rationalisme et du christianisme.
* Hannah Arendt (1906 – 1975) — Philosophe politique, spécialiste du totalitarisme.
* Gilles Deleuze (1925 – 1995) — Philosophe français, auteur de Le Pli. Leibniz et le baroque.
Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie
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1. Introduction
Dans cet épisode, Michel Onfray aborde l’un des ouvrages les plus controversés de Donatien Alphonse François de Sade, Les 120 journées de Sodome. Il propose une lecture politique et transhistorique du fascisme à travers ce roman, souvent réduit à son aspect littéraire ou érotique. Onfray démontre que l’œuvre sadienne ne se limite pas à une provocation mais illustre une pensée de la domination absolue, où la cruauté et la destruction deviennent des instruments politiques.
2. L’isolisme : un matérialisme extrême et féodal
Une rupture avec les autres matérialistes
Contrairement à Helvétius, d’Holbach ou La Mettrie, qui tempèrent leur matérialisme par une éthique sociale, Sade radicalise son approche en développant une doctrine qu’il appelle l’isolisme. Selon lui :
* L’homme est totalement seul, les autres n’existent que pour son plaisir.
* L’éthique n’existe pas, seule la loi de la nécessité dirige l’univers.
* Le monde se divise entre dominants et dominés, et c’est une fatalité naturelle.
Une philosophie féodale
Sade justifie une tyrannie sans limite en réhabilitant une noblesse absolue, regrettant la nuit du 4 août 1789, qui abolit les privilèges de l’aristocratie. Il oppose un système où les forts disposent de tous les droits, tandis que les faibles sont réduits à l’état de servitude.
3. Un projet totalitaire et sadien
Le roman comme laboratoire politique
Onfray souligne que Les 120 journées de Sodome n’est pas qu’un roman : c’est une expérimentation de la tyrannie parfaite. Dans un château isolé, quatre notables organisent un régime fondé sur la violence, le viol et la torture, établissant des règles précises pour l’exploitation systématique des victimes.
Un État totalitaire avant l’heure
Ce château préfigure les camps de concentration du XXe siècle :
* Un espace clos, hors de toute juridiction.
* Une absence totale de droit pour les prisonniers.
* Un règlement minutieux imposant la soumission absolue.
* La réduction des victimes à des objets sans volonté.
Sade propose ainsi un modèle de dictature extrême, où le pouvoir est exercé par le pur arbitraire des maîtres.
4. Une définition transhistorique du fascisme
De Mussolini à Sade : une continuité idéologique
Onfray élargit la définition du fascisme au-delà de son cadre historique strict. Il identifie plusieurs caractéristiques communes entre le sadisme politique et les régimes totalitaires modernes :
* Un contrôle absolu d’un territoire fermé, comme le château sadien ou les régimes fascistes.
* Une extraterritorialité juridique, où la loi ne s’applique plus aux détenus.
* Le règne de la violence pure, utilisée comme mode de gouvernance.
* L’anéantissement du sujet, réduit à un objet manipulable à volonté.
Une préfiguration des totalitarismes modernes
Sade, sans le savoir, décrit les mécanismes fondamentaux du fascisme et du totalitarisme. Onfray établit des parallèles avec :
* Les théories eugénistes développées au XXe siècle.
* Le contrôle des corps et de la sexualité dans les dictatures.
* L’usage de la terreur comme outil de domination absolue.
5. Sade et la justification de la cruauté
La destruction comme principe moral
Sade va au-delà du simple matérialisme : il fait de la cruauté une vertu. Dans Les 120 journées de Sodome, la souffrance des autres devient une source de plaisir et un moyen de prouver sa supériorité.
Une réécriture sadienne de la nature
Contrairement aux Lumières, qui pensent que la nature est une source d’harmonie, Sade affirme que la nature est intrinsèquement cruelle. Il légitime ainsi toutes les formes de violence en les naturalisant.
💡 Conclusion
Michel Onfray déconstruit l’image d’un Sade libertaire et révolutionnaire, en montrant qu’il est au contraire l’inventeur d’une philosophie du totalitarisme. Les 120 journées de Sodome n’est pas seulement un roman extrême, mais un manifeste pour une société de domination absolue, préfigurant les horreurs des dictatures modernes.
📚 Philosophes mentionnés
* Platon (env. 428 av. J.-C. – 348 av. J.-C.) — Philosophe idéaliste, influençant la pensée politique.
* Épicure (341 av. J.-C. – 270 av. J.-C.) — Philosophe matérialiste et hédoniste.
* Lucrèce (env. 94 av. J.-C. – env. 55 av. J.-C.) — Poète et philosophe épicurien.
* Pierre Gassendi (1592 – 1655) — Philosophe empiriste et matérialiste.
* René Descartes (1596 – 1650) — Philosophe rationaliste, défenseur du dualisme.
* Baruch Spinoza (1632 – 1677) — Philosophe rationaliste et panthéiste.
* Jean-Jacques Rousseau (1712 – 1778) — Philosophe des Lumières, théoricien du contrat social.
* Claude-Adrien Helvétius (1715 – 1771) — Philosophe des Lumières, théoricien du bonheur collectif.
* Paul-Henri Thiry d’Holbach (1723 – 1789) — Philosophe matérialiste, critique du christianisme et défenseur d’une éthique rationaliste.
* Donatien Alphonse François de Sade (1740 – 1814) — Écrivain et philosophe matérialiste, partisan d’une vision féodale et radicale du pouvoir.
* Friedrich Nietzsche (1844 – 1900) — Philosophe allemand, critique du rationalisme et du christianisme.
* Hannah Arendt (1906 – 1975) — Philosophe politique, spécialiste du totalitarisme.
* Gilles Deleuze (1925 – 1995) — Philosophe français, auteur de Le Pli. Leibniz et le baroque.
Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie
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1. Introduction
Dans cet épisode, Michel Onfray poursuit son analyse du Marquis de Sade, en se concentrant sur les concepts de fatalité, inégalité et cruauté qui traversent son œuvre et sa pensée. Onfray critique les interprétations modernes de Sade, notamment celles des surréalistes et des structuralistes, qui en ont fait un pur producteur de textes, ignorant son contexte historique, sa biographie et sa vision du monde. L’épisode explore en quoi Sade peut être considéré comme un philosophe et comment il s’inscrit dans la tradition matérialiste du XVIIIe siècle.
2. Sade est-il un philosophe ?
Les critères philosophiques selon Deleuze
Onfray rappelle la définition du philosophe donnée par Gilles Deleuze : un philosophe est celui qui invente des personnages conceptuels et crée des concepts. Sade pourrait ainsi être considéré comme un philosophe, car ses écrits mettent en scène des figures idéologiques et développent un système de pensée cohérent, bien que radical.
Une pensée construite à travers le roman
Sade exprime ses idées à travers ses romans philosophiques, où il alterne scènes de débauche et dissertations théoriques sur la nature humaine, la morale et la société. Onfray décrit ce procédé comme une alternance entre l’excès sexuel et la réflexion intellectuelle, créant ainsi une structure unique dans l’histoire des idées.
3. Le matérialisme de Sade : héritage et rupture
Un matérialiste dans la lignée des Lumières
Sade puise dans le matérialisme du XVIIIe siècle, notamment chez Helvétius, d’Holbach et La Mettrie. Il reprend :
* L’éloge des passions, communes aux matérialistes, contre les traditions idéalistes et religieuses.
* Le déterminisme absolu, rejetant le libre arbitre et affirmant que l’homme est gouverné par des lois naturelles inévitables.
* Une vision athée et immanente du monde, où tout est matière et énergie, sans transcendance.
Une radicalisation du matérialisme
Sade dépasse les autres matérialistes en tirant des conséquences extrêmes de leur philosophie :
* Il refuse toute morale collective, estimant que seules comptent les pulsions individuelles.
* Il défend une hiérarchie des êtres, où les forts ont naturellement le droit d’opprimer les faibles.
* Il célèbre la cruauté comme loi fondamentale de la nature, au-delà même de l’utilitarisme d’Helvétius ou de l’éthocratie de d’Holbach.
4. La fatalité et l’inégalité comme lois naturelles
L’homme est-il libre ?
Pour Sade, l’homme est un pur produit des lois naturelles. Il ne choisit rien : ni ses désirs, ni ses actes, ni son destin. Cette absence totale de libre arbitre conduit à une vision du monde où :
* La morale est une illusion sociale imposée par les faibles pour limiter les forts.
* La société n’a aucun sens, car elle est un artifice contre la nature.
Une justification de l’inégalité
Sade ne cherche pas à corriger les inégalités, mais à les exacerber. Il considère que :
* Les forts doivent exercer leur domination sans entrave.
* Les faibles ne sont que des objets pour la jouissance des puissants.
* L’idée de justice est un leurre, car la nature elle-même n’a pas de morale.
5. La cruauté, essence du monde et moteur du plaisir
Une philosophie de la destruction
Sade va plus loin que le simple matérialisme : il fait de la destruction une fin en soi. Contrairement à l’hédonisme classique, qui cherche le plaisir réciproque, Sade prône un plaisir fondé sur la domination, la souffrance et l’humiliation de l’autre.
Un monde divisé entre bourreaux et victimes
Dans la logique sadienne, il n’existe que deux types d’individus :
* Les bourreaux, qui jouissent de leur pouvoir et de leur liberté totale.
* Les victimes, qui subissent sans recours possible.
La seule règle qui vaille est celle du rapport de force, où chaque être humain doit exploiter ses capacités de destruction pour maximiser sa jouissance.
💡 Conclusion
Michel Onfray déconstruit le mythe d’un Sade progressiste ou révolutionnaire, en montrant qu’il est au contraire un réactionnaire féodal, exaltant la loi du plus fort et niant toute forme de justice sociale. Son matérialisme extrême le distingue des Lumières et le place dans une catégorie à part : celle d’un philosophe de la cruauté absolue, où la fatalité, l’inégalité et la violence sont érigées en principes fondamentaux du monde.
📚 Philosophes mentionnés
* Épicure (341 av. J.-C. – 270 av. J.-C.) — Philosophe matérialiste et hédoniste.
* Lucrèce (env. 94 av. J.-C. – env. 55 av. J.-C.) — Poète et philosophe épicurien.
* Pierre Gassendi (1592 – 1655) — Philosophe empiriste et matérialiste.
* René Descartes (1596 – 1650) — Philosophe rationaliste, défenseur du dualisme.
* Baruch Spinoza (1632 – 1677) — Philosophe rationaliste et panthéiste.
* Jean-Jacques Rousseau (1712 – 1778) — Philosophe des Lumières, théoricien du contrat social.
* Claude-Adrien Helvétius (1715 – 1771) — Philosophe des Lumières, théoricien du bonheur collectif.
* Paul-Henri Thiry d’Holbach (1723 – 1789) — Philosophe matérialiste, critique du christianisme et défenseur d’une éthique rationaliste.
* Donatien Alphonse François de Sade (1740 – 1814) — Écrivain et philosophe matérialiste, partisan d’une vision féodale et radicale du pouvoir.
* Friedrich Nietzsche (1844 – 1900) — Philosophe allemand, critique du rationalisme et du christianisme.
* Gilles Deleuze (1925 – 1995) — Philosophe français, auteur de Le Pli. Leibniz et le baroque.
Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie
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