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  • La transition écologique, c'est la troisième préoccupation des électeurs européens après le pouvoir d'achat et l'immigration. Elle est pourtant absente des débats. Pourquoi ?

    Selonl'enquête Eurobaromètre réalisée en 2023, plus de la moitié des Européens pensent que face à la flambée des prix de l'énergie, la transition écologique devrait se faire plus rapidement. Et pour trois quarts d'entre eux, le chemin pour y parvenir, c'est l'innovation. Ils attendent que l'UE donne une feuille de route sur ce sujet.

    Les écologistes à la traîne

    Pourtant, les partis écologistes risquent de figurer parmi les grands perdants du scrutin européen, qui s'achèvera dimanche. Contraste flagrant avec les élections de 2019 : en France, la liste Europe Écologie-Les Verts arrivait au troisième rang avec près de 14 % des voix. Cette année, les sondages ne donnent aux écologistes que 5 % d'intentions de vote. Pourtant, cette question figure bien dans les programmes. Mais le contexte y est moins favorable.

    En 2019, il y a eu les marches pour le climat inspirées par Greta Thunberg. En 2024, il y a eu la crise agricole sous fond de contestation du Pacte Vert. Au point de faire dire à une candidate de droite conservatrice estonienne que son pays devrait peut-être réduire ses ambitions écologiques. Tandis qu'en Pologne, les agriculteurs dénonçaient les lourdeurs administratives liées à l'usage des pesticides, en France, c'est le discours politique qui change.

    On parle désormais plus de politique industrielle, et moins des objectifs écologiques. Même les parties de gauche n'insistent plus sur ces enjeux, devenus électoralement moins porteurs.

    Un nouveau Pacte Vert en Europe ?

    Rappelons que le pacte actuel a pour objectif d’atteindre la neutralité carbone en 2050 et de réduire de 55 % les émissions de gaz à effet de serre, d’ici à 2030. Ce que propose un collectif d'intellectuels, dont Bertrand Badré, ancien directeur général de la Banque mondiale, dans une tribune publiée en mars entre autres par « Le Monde », c'est d'y apporter des réajustements.

    Il s'agit de rémunérer correctement les services écosystémiques rendus par les agriculteurs, de conditionner les aides au « made in Europe », y compris pour l’achat de véhicules électriques, de faire, à l'instar des plans de relance post-Covid, un plan communautaire pour stimuler les industries européennes qui ambitionnent d'être neutres en matière d'émissions carbones. Voilà ce que pourrait être un nouveau Pacte Vert européen, basé non pas sur les normes, mais sur un contrat social négocié à l'intérieur des États membres.

  • L'inflation repart à la hausse dans la zone euro. Voilà une mauvaise nouvelle pour la Banque centrale européenne qui se dirige vers sa première baisse des taux depuis cinq ans. La montée des prix, notamment à la consommation, pourrait inciter l'institution à la prudence. La gardienne de l'euro a augmenté les coûts d'emprunt à un niveau record pour lutter contre l'inflation. Mais à quel prix ?

    L'inflation repart à la hausse dans la zone euro : 2,6 % en mai, contre 2,4 % en avril. Voilà une mauvaise nouvelle pour la Banque centrale européenne qui devrait néanmoins valider une première baisse des taux depuis cinq ans aujourd’hui. La montée des prix, notamment de l'alimentation, pourrait cependant inciter l'institution à la prudence. Pour endiguer l'inflation, qui reste une des principales préoccupations des Européens, la BCE a porté les coûts d'emprunt à un niveau record. Mais à quel prix ?

    La croissance économique entravée

    On attend cet assouplissement de la politique monétaire depuis très longtemps. Jusqu'ici la BCE s'était montrée très prudente. Les taux élevés ont eu pour effet d’entraver la croissance économique. Elle est d'ailleurs toujours en berne. D'après le dernier baromètre de BPIFrance le Lab, de nombreuses entreprises repoussent encore leurs projets d'investissement.

    La baisse des taux attendue cet après-midi pourrait être minime : 25 points de base, de 4 % à 3,75 %. Mais cela suffirait pour apporter un bol d'air aux emprunteurs. Depuis deux ans, le coût du crédit explose. Cela pèse notamment sur le marché de l'immobilier. La construction des logements neufs a chuté de 24% sur un an. Et les ventes ont été divisées par deux.

    Cette baisse des taux constituerait donc un coup de pouce bienvenu pour les ménages qui veulent accéder à leur premier logement. Bon nombre de Français ont reporté leurs achats immobiliers, ce qui a créé de son côté un bouchon sur le marché locatif.

    Quid des petits épargnants ?

    Avec les taux bancaires réduits, les épargnants seront moins bien rémunérés. la baisse des taux directeurs pénalisera les produits d'épargne, comme le livret A, très populaire en France. Mais les États qui empruntent sur les marchés vont eux pouvoir souffler un peu. Comme pour les ménages et les PME, le prix pour lequel les pays de la zone euro se financent est lié à la politique de la BCE.

    Le pouvoir d'achat, sujet numéro un

    Depuis deux ans, le pouvoir d'achat ne cesse de baisser en Europe. Cette question reste centrale pour de nombreux Européens qui s'apprêtent à voter le 9 juin prochain.

    Les salaires en zone euro ont augmenté de 4,7 % au premier trimestre. Mais cela n'a pas suffi à compenser les pertes de revenus réels liés à l'inflation qui sévit depuis 2022. La BCE prévoit une hausse des rémunérations de 4,5 % cette année, puis de 3,6 % en 2025, et de 3 % en 2026. Des augmentations qui risquent d’alimenter l’inflation. Pour éviter un cercle vicieux où l’inflation conduit à une hausse des salaires, qui alimente à son tour une pression inflationniste, la BCE, pourrait d’ailleurs dans un premier temps décider de ne réduire ses taux qu'une fois par trimestre. Déjà un bon début.

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  • Le groupe audiovisuel français Canal+ a fait un pas supplémentaire ce mardi vers le rachat du géant sud-africain de la télévision MultiChoice. L’offre de Canal a en effet été jugée « raisonnable » par un collège d’experts désigné par MultiChoice. Le rachat pourrait toutefois prendre encore plusieurs mois, le temps d’obtenir les autorisations réglementaires.

    Ce projet de rachat est dans les tuyaux depuis des mois, c’est un projet chiffré à 1 milliards 500 millions d’euros. Le Français Canal+ veut grossir. Il est déjà présent à l’international, au Vietnam, en Pologne, ou encore en Autriche. Mais Canal+ veut aussi élargir sa présence en Afrique.

    Le groupe de télé payante sud-africain MultiChoice est présent dans 16 pays africains : Zimbabwe, Mozambique, Ghana, ou encore Nigéria, l’Afrique anglophone et lusophone, donc. Et comme Canal+ de son côté est présent principalement en Afrique francophone, les deux acteurs sont vus comme complémentaires.

    L'ambition de Canal+ : construire un mastodonte mondial du divertissement ?

    Jusqu’à maintenant, MultiChoice était le principal concurrent de Canal+ en Afrique. Mais le groupe français estime que pour rivaliser avec les énormes plateformes américaines comme Netflix, Amazon Prime, ou encore Disney+, il faut investir et s’allier. Jacques du Puy, directeur de Canal+ International, le confiait à RFI en février 2024 : « Les deux groupes ensemble, ça fait 50 millions d’abonnés, ce qui est déjà plus respectable par rapport à des groupes comme Netflix, qui a 260 millions d’abonnés.»

    Environ 26 millions d’abonnés Canal, 23 millions d’abonnés MultiChoice, cette fusion, si elle aboutit, permettrait au groupe de quasiment doubler de taille. À tel point que Canal+ parle d’une étape qui serait « historique ». Sachant que si tout se passe comme prévu, le nouvel ensemble pourrait être doublement coté en Bourse : en Europe, et à Johannesburg.

    Un projet aussi pour soutenir de nouvelles créations africaines

    Le groupe français estime que le continent africain « offre de grandes perspectives, avec des histoires riches et variées, des talents nombreux ». Canal assure que cette nouvelle entité permettrait d'investir davantage dans la production locale. Le groupe cite en exemple la série « Spinners » produite à la fois par Canal+ et MultiChoice : un thriller de 8 épisodes qui prend place dans les townships du Cap.

  • Les élections européennes auront lieu dimanche 9 juin prochain. La voiture électrique s'est invitée dans les débats. En 2035, les véhicules neufs à moteur thermique ne pourront plus être vendus dans l'UE. Mais plusieurs listes en lice notamment de droite et d'extrême droite veulent abroger cette décision. Cette question est même devenue pour elles un argument de campagne. Ces positions inquiètent l'industrie automobile européenne.

    D'après les ventes d'avril, chiffres publiés par l'Association des constructeurs européens d'automobiles, les voitures électriques sont en troisième position, avec 12% des parts du marché, derrière les moteurs à essence, 36 %, et les véhicules hybrides, en forte progression à 29%. Si les clients restent encore frileux, les industriels ont clairement mis le cap sur la transition. Ils ont beaucoup investi dans cette course à la décarbonation et demandent aux politiques de ne pas changer les règles. Un revirement européen ruinerait leurs efforts, disent-ils.

    Les marques chinoises ont une longueur d'avance

    D'autant que les fabricants chinois ont une longueur d'avance, y compris au niveau des prix, qui sont très bas côté chinois. Même fabriquée en Europe, une auto électrique chinoise est 25% moins chère que sa concurrente européenne. Face à l'offensive des marques chinoises, l'UE s'apprête à taxer ces importations. Accusant Pékin de doper illégalement ses constructeurs sur le marché européen grâce à des prix maintenus artificiellement bas, Bruxelles a ouvert une enquête anti-subventions. Celle-ci devrait aboutir d'ici juillet prochain à l'augmentation des droits de douane à 30%, contre 10% actuellement. La Chine, elle, dénonce une démarche protectionniste. Toutefois, même avec ces restrictions, les marques chinoises devraient rester compétitives. Et ce notamment en raison de temps de fabrication : BYD, l'une des marques électriques chinoises les plus vendues en Europe, se targue de produire sa voiture en cinq heures seulement, alors qu'il faut dix heures à Renault pour produire sa toute nouvelle R5 dont la fabrication débute dans le nord de la France.

    Quel avenir pour les marques européennes ?

    Les acteurs de la filière européenne, loin de vouloir faire machine arrière, réclament même « pacte européen de l'automobile ». Il comprendrait un soutien commun aux grands projets industriels, à l'innovation, notamment en ce qui concerne les composants de batteries et le traitement des matériaux critiques. Mais aussi une politique de primes à l'achat, mieux coordonnées au niveau européen. Et pourquoi pas des aides écologiques conditionnées sur le lieu de production. Actuellement, 8% des voitures électriques vendues en Europe sont chinoises et cela devrait passer à 15% en 2025. Quand les partis de droite et d'extrême droite estiment que l'interdiction des ventes de véhicules thermiques en 2035 est un cadeau fait aux industriels chinois et qu'il nuit au pouvoir d'achat des Européens, les constructeurs européens assurent, au contraire, que stopper le processus ne ferait que les pénaliser davantage dans la compétition mondiale à laquelle ils sont soumis.

  • Les élections européennes auront lieu ce week-end. Les citoyens de l'Union élisent leurs députés européens. Dans de nombreux pays, l'immigration a été un thème de campagne important, un sujet de prédilection pour les partis populistes, qui pointent souvent du doigt les étrangers pour expliquer les difficultés économiques. Est-ce que l'immigration pénalise l'économie européenne ?

    Ces trente dernières années, l'immigration en Europe a eu des effets positifs ou neutres sur l'économie de l'Union. L'arrivée de migrants n'a pas affecté le chômage ou encore les salaires, en moyenne. Les travailleurs étrangers n'ont pas non plus eu d'effets néfastes sur les finances publiques des pays d'accueil. Au contraire, ils et elles ont contribué en payant des impôts, des cotisations sociales, etc. L'immigration a enfin plutôt augmenté le niveau de vie moyen dans les pays d'accueil. On retrouve ces conclusions dans plusieurs études concordantes.

    Il y a des disparités et des nuances selon les périodes et les pays. Certaines recherches, par exemple, ont conclu que l'immigration avait tiré à la baisse les salaires des travailleurs nationaux peu diplômés. Mais au global et sur le moyen et le long terme, les études menées concluent qu'au pire l'effet est neutre sur l'économie. Et il y a une autre question qui est moins souvent posée, dans le cadre des campagnes électorales en tout cas, c'est de savoir si l'économie européenne peut se passer des travailleurs étrangers.

    Un besoin de main-d'œuvre

    Un Européen sur cinq a plus de 65 ans, et ce chiffre augmente d'année en année. Il y a moins de naissances et au rythme actuel, la population italienne pourrait diminuer de moitié d'ici à la fin du siècle, estime la Banque mondiale. Il faut de la main-d'œuvre pour cotiser, mais aussi pour s'occuper des personnes âgées ou encore des malades. D'ici 2030 plus de deux millions de postes d'infirmiers ou d'infirmières pourraient ne pas être pourvus dans l'Union européenne. Pour compenser le vieillissement de la population, il faudrait au moins 700 000 travailleurs étrangers chaque année, d'après l'assureur Allianz. L'immigration actuelle ne permet pas de combler les besoins économiques.

    À tel point que l'Italie, qui est dirigée par un gouvernement d'extrême droite anti-migrants, se tourne paradoxalement vers l'immigration choisie. Le gouvernement de Giorgia Meloni a annoncé l'an dernier qu'il accorderait plus de 400 000 permis de travail pour des non-européens d'ici à 2025. La Hongrie du nationaliste Viktor Orban a pris aussi un virage similaire l'an dernier. D'autres pays européens, de tendances politiques différentes, comme l'Allemagne, ont également pris des mesures pour faciliter l'immigration de travail.

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  • Un mois après Moody’s et Fitch c’est au tour de Standard & Poor's de rendre son verdict sur les finances publiques de la France. L’agence pourrait être moins clémente que ses deux concurrentes américaines.

    Fin avril, les deux agences ont conservé son double A à la France. Une très bonne note, identique à celle attribuée en décembre 2023 par Standard & Poor's. Mais elle l’a assortie d’une perspective négative qu’elle a promis d’appliquer si les conditions qu'elle a précisées noir sur blanc ne sont pas réunies. L’agence attend notamment une réduction du déficit débouchant sur la baisse du ratio dette-PIB. Or le déficit public français se creuse. Contrairement à l'engagement pris par Bercy, il a largement dépassé les 5% l’an dernier. L’objectif du ministre des Finances est de repasser sous la barre des 3% en 2027. Un objectif jugé peu crédible par le FMI. L’agence américaine a donc au moins une bonne raison d’abaisser la note de la France. Quant à la dette, son poids par rapport au PIB a légèrement reculé, le radio est aujourd’hui de 110%.

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    Vers un engrenage mortifère

    La décision de Standar & Poors est redoutée d’abord parce que l’agence est la plus écoutée par les marchés, et donc la plus menaçante pour les emprunteurs. Une dégradation de la note peut déclencher un engrenage mortifère pour les finances publiques : la fuite des investisseurs et donc la hausse des taux d'intérêt. Par conséquent, la charge de la dette s'alourdit. En 2023, la France a dépensé 50 milliards d'euros pour le service de sa dette, selon Fipeco. Ce poste va gonfler dans les prochaines années. En 2027, il dépassera 70 milliards selon les prévisions de Bercy. À titre de comparaison, le budget de la défense est cette année inférieur au service de la dette.

    Les atouts de la France

    Quand le service de la dette augmente, c’est donc de l’argent en moins pour des missions essentielles de l'État. Et des coupes sombres en perspective dans les dépenses pour réduire l'endettement excessif. Un scénario assez effrayant, mais jugé peu probable. Cela fait 50 ans que la France creuse sa dette et vit au-dessus de ses moyens en restant épargnée par une crise de la dette. Aujourd'hui, elle est encore mieux notée que le Portugal, le pays devenu le plus vertueux de la zone euro. Ce qui fait la différence, c’est d’abord la solidité et la diversité de son économie, soulignée par les trois agences. Ensuite, les réformes structurelles entreprises par le président Macron, comme celle de l'indemnisation du chômage qui est en cours. Des réformes saluées par les agences. On verra ce soir si ces atouts sont jugés suffisants pour retenir la main de Standard & Poor's. En cas de dégradation, l'envolée des taux n'est pas non plus une fatalité. Car la France dispose d'un solide matelas d'épargne qui rassure les investisseurs. La dette de l'État dépasse maintenant les 3 000 milliards d’euros, mais les actifs des ménages sont au moins six fois supérieurs. Pas vraiment la situation d’un pays en déroute.

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  • Au Mexique, l’élection présidentielle prévue dimanche 2 juin devrait donner la victoire à Claudia Sheinbaum, la candidate adoubée par le président en exercice. Andres Manuel Lopez Obrador, surnommé AMLO, a un bilan mitigé sur le plan économique, il bénéficie pourtant d’une popularité record, nourrie par ses succès dans la lutte contre la pauvreté.

    Quelque 57 % des Mexicains estiment que l’économie va mieux, 73 % que le niveau de vie a augmenté. Cette photo de l’opinion publique prise par l'institut Gallup peut faire pâlir d’envie bien des chefs d’État. Elle reflète les progrès réels enregistrés depuis l'arrivée au pouvoir de Andres Manuel Lopez Obrador, dit AMLO. Sous l’impulsion de ce président de gauche, élu sur un programme de rupture, le salaire minimum a quasiment doublé en six ans. Les transferts sociaux, notamment en faveur des retraités, ont fortement augmenté. Cinq millions de Mexicains sont ainsi sortis de la pauvreté. Pour tenir cette promesse sans laisser dériver les dépenses publiques, le président mexicain a en revanche sacrifié l’éducation et à la santé. Leur poids relatif dans le budget a baissé, il est maintenant inférieur au niveau considéré par le FMI comme minimum pour assurer le développement.

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    Une croissance décevante

    L’autre bémol pointé par le FMI : la faiblesse de la croissance. Elle est de 1 % en moyenne depuis six ans. C'est anémique pour la quatorzième économie mondiale. C’est nettement moins bon que sous les présidents précédents. Et médiocre comparé aux autres pays d’Amérique latine. Sur la même période, le Mexique fait à peine mieux que l’Argentine et l’Équateur, les lanternes rouges de la région. Le Mexique a pourtant un sérieux atout : son grand voisin américain, dont il est devenu l’an dernier le premier partenaire commercial.

    Le Mexique, premier partenaire commercial des États-Unis

    Le Mexique est le grand gagnant de la guerre commerciale entre la Chine et les États-Unis. Grâce aux relocalisations de l’industrie. Cette aubaine n’a pas pour autant galvanisé la croissance. Les investisseurs étrangers sont rebutés par la piètre qualité des services. La distribution de l'eau et de l'électricité laisse à désirer, les routes sont dans un état piteux. Seules les sociétés déjà présentes ont agrandi leurs usines, mais pour le moment, il n’y a pas de ruée de nouveaux venus. Si le président du Mexique a réussi à limiter les inégalités, il n’a pas vraiment lancé les grands chantiers nécessaires pour accélérer le développement et résorber le fossé entre le nord, très prospère, tourné vers les États-Unis, et le sud du pays, encore déshérité. La raffinerie et le train des mayas destinés à doper le tourisme, deux infrastructures construites dans l’État du Tabasco, n’ont pas encore produit les effets escomptés.

    Une transition énergétique en panne

    Le Mexique accuse aussi un gros retard dans la transition énergétique. Seulement 10% du courant provient des énergies renouvelables. Le président a favorisé les services publics basés sur le pétrole, dont le pays était un exportateur net jusqu’en 2019. Mais la Pemex, la société nationale des hydrocarbures, est à bout de souffle. C’est aujourd’hui la société pétrolière la plus endettée au monde. L’État, qui l’a longtemps considéré comme sa vache à lait, la soutient aujourd’hui bout de bras, à contre-courant de ses objectifs officiels de décarbonation.

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  • L’économie des territoires palestiniens, déjà brisée par la guerre, est désormais menacée d’une quasi-asphyxie financière. Le ministre israélien des Finances, un ultranationaliste, dit vouloir bloquer les transferts d’argent entre l'État hébreu et l'administration palestinienne.

    Une menace brandie lorsque l’Espagne, l’Irlande et la Norvège ont annoncé leur intention de reconnaître l’État palestinien. Une intention qui s'est matérialisée mardi. Le ministre des Finances Bezalel Smotrich est membre d’un parti d’extrême droite devenu indispensable au maintien au pouvoir de Benyamin Netanyahu. Ce qui donne une grande marge d'action à ce dur du gouvernement, partisan de l’annexion de la Cisjordanie et de la destruction de Gaza. Depuis l’attaque du 7 octobre, il multiplie les gestes punitifs à l’égard de l’Autorité palestinienne qu’il accuse de financer le Hamas. Il dispose pour cela de puissants leviers.

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    Les recettes fiscales des Palestiniens contrôlées par Israël

    Depuis les accords de Paris signés en 1994 par l'OLP, son ministère prélève les taxes sur les importations palestiniennes transitant par Israël et il transfère ensuite le produit de la collecte. C'est la principale source de recettes de l'administration de Ramallah. Le ministre a par ailleurs le pouvoir d'autoriser ou pas des banques israéliennes à effectuer des transactions en shekel pour le compte des Palestiniens. Ces procédures exceptionnelles devaient expirer avec les accords d’Oslo, mais faute de percée dans les négociations, elles sont encore en vigueur, d’une utilité vitale pour les territoires. Et le ministre israélien des Finances veut donc suspendre les deux dispositifs.

    Une menace déjà mise à exécution

    Il a déjà interrompu le versement des taxes après l’attaque du 7 octobre. En conséquence, les fonctionnaires palestiniens n'ont pas été payés pendant plusieurs mois, faute de cash dans les caisses de l’autorité palestinienne. Il a fallu l’intervention d’un tiers indépendant, la Norvège, pour que le versement soit enfin réactivé en février via un fonds basé dans ce pays. Avec la reconnaissance de l’État palestinien par Oslo, ce canal pourrait à nouveau être refermé. La Norvège n’est plus un partenaire neutre, estime le trublion de l’extrême droite.

    Suspense sur l’autorisation accordée aux banques israéliennes

    Pour sanctionner l’administration palestinienne, il veut aussi révoquer l’habilitation accordée chaque année en juillet aux banques israéliennes. Cette décision entraînerait des conséquences catastrophiques dans les territoires. C’est via les banques israéliennes que l’Autorité règle l’eau, l’électricité, les produits agricoles en provenance de l’État hébreu. Des commodités de première nécessité pour les habitants de la Cisjordanie. Ces liens financiers entre Palestiniens et Israéliens portent sur des montants importants. La facture des importations palestiniennes via Israël se monte à 8 milliards de dollars et ses exportations à 2 milliards de dollars.

    Les pressions américaines sur Israël

    Les États-Unis ont mis en garde le gouvernement Netanyahu sur les effets dévastateurs d’une telle décision. Jack Sullivan, le conseiller à la sécurité de Joe Biden, puis Janet Yellen, la secrétaire au Trésor, ont tous les deux rappelé que maintenir à flot ce qu'il restait de l'économie palestinienne était le meilleur rempart contre les débordements de la rue palestinienne. Et de rappeler tous les deux que contrairement aux affirmations du ministre, l'Autorité palestinienne ne détourne aucun fonds au profit du Hamas. On verra dans les prochains jours si les pressions américaines suffisent à faire reculer l'un des ministres les plus virulents du gouvernement Netanyahu.

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  • À la veille des élections législatives en Afrique du Sud où l'ANC est donnée perdante dans les sondages, gros plan sur les faiblesses de l'économie. Trente ans après la fin de l'apartheid, la majorité noire souffre toujours d'inégalités écrasantes. Un échec largement attribué au parti au pouvoir.

    Cette année, l'Afrique du Sud sera la première économie du continent africain en termes de PIB d’après les dernières prévisions du FMI. C'est à peu près le seul titre dont peut s'enorgueillir le président Ramaphosa. Mais il est trompeur. Avec ses activités diversifiées, son industrie développée, l'Afrique du Sud est première du continent en volume de richesses, mais en termes de croissance, elle fait pâle figure, derrière l'Angola, la Zambie et même le Zimbabwe depuis trente ans. La comparaison avec les grands émergents comme la Chine ou l'Inde est encore plus accablante car sa croissance réelle, sans l'inflation, est faiblarde, voire négative. Son PIB culmine en 2011. Depuis, le PIB par habitant a reculé de 23 % et les inégalités ont explosé. L'Afrique du Sud est le pays le plus inégalitaire au monde selon la Banque mondiale. Et c'est la majorité noire de la population qui en souffre le plus.

    40 % des Noirs sans travail

    Le fossé entre les Noirs et les Blancs est particulièrement choquant sur le marché de l'emploi, miné par un taux de chômage supérieur à 30 %. Ce taux est de 40 % parmi les Noirs et 7 % seulement pour la minorité blanche. 60 % des terres sont encore cultivées par des fermiers blancs, 16 % seulement par des Noirs à l'issue de la réforme agraire qui devait rééquilibrer l'accès à la propriété des terres. Idem pour l'actionnariat des entreprises cotées : 70 % des sociétés appartiennent encore aux Blancs. Dans le contexte d'appauvrissement généralisé, le nombre des personnes dépendant de l'aide sociale a explosé, cela concerne le tiers de la population.

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    Le fiasco du Black Economic Empowerment

    Le Black Economic Empowerment, une politique de discrimination positive en faveur de la population de couleur, n'a pas fonctionné comme prévu. Certains n'hésitent pas à parler d'un échec. D'un système déformé par l'usage. Seule une minorité noire s'est considérablement enrichie. Essentiellement des membres de l'ANC invités à la table des dirigeants blancs. Ils ont obtenu des participations au capital des grandes entreprises, des postes de direction, et sont devenus alors les meilleurs alliés économiques de leurs ex-oppresseurs. Le Black Economic Empowerment a été le terreau de la corruption. Aux détriments des collectivités qui passaient des appels d'offre, mais aussi des entreprises qui ont perdu en compétitivité.

    Les défaillances du réseau électrique

    La corruption endémique est l'une des causes de la défaillance chronique de la compagnie nationale d'électricité. Les déboires d'Eskom, devenue incapable de fournir du courant en continu, est la plaie la plus douloureuse de l'économie sud-africaine. La situation s'est améliorée depuis quelques mois, mais il est encore trop tôt pour parler d'un retour à la normale. La croissance sud-africaine sera cette année inférieure à 1 %. Selon le FMI, elle pourrait bondir à 3 ou 5 % si le courant était rétabli de manière durable. Cette déliquescence du réseau, avec des conséquences négatives sur le transport ferroviaire, est l'un des facteurs qui poussent certains investisseurs étrangers à reporter leurs projets.

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  • La Russie aurait découvert une importante quantité de pétrole, l'équivalent de 511 milliards de barils sur ce continent situé autour du pôle Sud. Une convention internationale protège toute exploitation de l'Antarctique, mais cette découverte pourrait la remettre en question.

    L'information a été dévoilée par le magazine américain Newsweek, qui affirme que cette découverte a été faite par un navire de prospection russe, dont l’activité a été documentée notamment lors de son passage en Afrique du Sud et dont les résultats de recherche ont été présentés au comité d’audit de l’environnement de la Chambre des Communes du Parlement britannique. Les forages auraient eu lieu en mer de Weddell, un territoire que les Britanniques revendiquent au même titre que le Chili et l’Argentine.

    Moscou, de son côté, se défend et explique que les études conduites par le navire Alexander Karpinsky seraient uniquement scientifiques. Le bateau a pourtant été affrété par Rosgeo, l’agence chargée d’identifier de nouvelles réserves géologiques à des fins commerciales. La Grande-Bretagne questionne donc sérieusement les ambitions de Moscou. Des députés britanniques ont même affirmé que « ces études pourraient être un préalable à l’introduction d’appareils de forage » pour exploiter cette région inhabitée et vierge de 1,7 million de km2. La Russie, on le sait, a besoin de revenus pour nourrir son économie de guerre.

    Activité minière interdite

    Le traité sur l’Antarctique de 1959 interdit strictement l’exploration et l’exploitation d’hydrocarbures dans cette région du monde. De plus, la convention de Madrid de 1991 et le consensus d'interdiction de toute activité minière de 1998 interdisent jusqu'en 2048 l'exploitation du sous-sol de l'Antarctique. Mais tout État peut retirer sa signature et ne plus être soumis aux engagements du traité. La Russie pourrait donc contourner ces interdictions. La Chine pourrait aussi vouloir réclamer sa part du gâteau : Pékin vient d’ouvrir sa cinquième station en Antarctique et cherche aussi à renforcer sa présence dans cette région, officiellement, là aussi, pour des raisons scientifiques.

    L'enjeu commercial est vertigineux : les réserves de pétrole annoncées par les Russes pourraient permettre de produire jusqu’à 511 milliards de barils de pétrole ; à titre de comparaison, le monde entier consomme environ 36 milliards de barils par an, selon l'Energy Institute Statistical Review of World Energy de 2023. Il y aurait donc de quoi assouvir la soif de pétrole et de gaz du monde entier pendant au moins quarante ans.

    Catastrophe écologique

    Aujourd’hui, l’Antarctique est d’abord victime du réchauffement climatique : l’ouest de la péninsule est l’une des régions connaissant le réchauffement le plus rapide de la planète et la couche de glace de l’Antarctique représente environ 61% de la totalité de l’eau douce sur Terre. Si cette couche devait fondre intégralement, cela conduirait à une élévation de 58 mètres du niveau de la mer, une catastrophe écologique.

    Pour dire les choses plus simplement, c’est là une très mauvaise nouvelle à tous les points de vue. Une telle réserve de carburants fossiles va, en effet, rendre d’autant plus difficile l’arrêt de la dépendance au pétrole et au gaz dont la demande et toujours aussi importante. Or, à l'issue de la dernière COP, le texte final a mis en avant la nécessaire transition hors des énergies fossiles. Ce qui reste rassurant, c’est le fait qu’exploiter des hydrocarbures en Antarctique seraient très coûteux et probablement assez peu rentable, ce qui pourrait freiner les investissements sur place.

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  • En amont du G7 finance qui se déroule en fin de semaine en Italie, Janet Yellen, la secrétaire au Trésor, invite les Européens à faire front commun avec les États-Unis, face à la Chine.

    Face à la Chine et à son offre surabondante qui inonde les marchés du monde entier, que ce soit dans le domaine de la voiture électrique, de la batterie ou de l'énergie solaire, Américains et Européens ont besoin de travailler ensemble, a expliqué en substance la secrétaire américaine au Trésor. Jusqu'à maintenant, les États-Unis ont plutôt fait cavalier seul. Donald Trump a déclenché la guerre commerciale et Joe Biden l’a poursuivie. La semaine dernière, il a pris une nouvelle mesure spectaculaire en imposant des droits de douane de 100 % sur les véhicules électriques chinois. Pour la secrétaire au Trésor, le besoin de coordination entre l'Europe et les États-Unis ne fera qu'augmenter à l'avenir. Il y va, dit-elle, de la survie des entreprises.

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    La voie médiane de l’Europe

    Les Européens privilégient une voie plus modérée face à la Chine. Depuis quelques mois, les 27 durcissent le ton et lancent sans complexe des enquêtes contre des industriels chinois chaque fois qu’ils estiment que le jeu de la concurrence est faussé. Sans pour autant partir en croisade. Les mesures adoptées par Bruxelles sont toujours soigneusement calibrées. Ursula von der Leyen, la présidente de la commission candidate à un nouveau mandat, a rappelé en début de semaine à nos confrères du Financial Times l'attachement de l’Europe à cette voie médiane. Un choix qui a des motivations économiques. Les 27 exportent aussi en Chine. Et leurs entreprises, surtout les allemandes, y sont très présentes. Elles seront en première ligne en cas de représailles. C’est d’ailleurs sur le sol allemand que Janet Yellen a lancé son appel. Invitée par l’école de commerce de Francfort, elle s’est exprimée en présence du ministre allemand des Finances, le libéral Christian Lindner, pas vraiment un fan des enquêtes voulues par la France sur les subventions aux voitures électriques chinoises.

    La menace des droits de douane européens

    C’est pourtant sur ce marché du e-véhicule que les Européens pourraient très vite rejoindre les États-Unis. Si l’enquête confirme des subventions excessives versées aux trois constructeurs ciblés par la procédure, la commission pourrait imposer des droits de douane de 30 % sur les e-véhicules chinois dès le début du mois de juillet. On est encore très loin des 100 % appliqués aux États-Unis. Mais ce serait une première décision très martiale de la part des 27 ; une décision motivée pas seulement par l’enquête, mais influencée aussi par la décision américaine que les Européens. Car si les volumes excédentaires des véhicules chinois sont bloqués sur le marché américain, ils iront vers d’autres continents, notamment en Europe, le premier marché mondial du véhicule électrique. Et pour la Chine, l'impact sera beaucoup plus sensible. Le tiers des voitures électriques exportées par la Chine sont destinées à l'Europe, contre 1 % seulement pour le marché américain.

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  • Les émeutes qui embrasent la capitale de la Nouvelle-Calédonie depuis le 13 mai ont éclaté sur fond de crise économique. La filière nickel, le poumon du « caillou », est au bord de la faillite.

    L’an dernier, les cours du métal se sont effondrés de moitié. Résultat, en valeur, les exportations de nickel de la Nouvelle-Calédonie ont chuté de 15% en 2023. Cela a été le coup de grâce pour une filière déjà très mal en point.

    Pourtant, entre les années 1960 et 2000, le nickel est un moteur de l'économie. C’est grâce à ce minerai que la Nouvelle-Calédonie atteint un niveau de vie comparable à celui de la métropole. Les trois usines actuelles génèrent 10% du PIB et un quart de l’emploi privé. Si la faillite survient, 70 000 emplois seront sur la sellette.

    L'exploitation demeure un filon d’avenir, parce que la Nouvelle-Calédonie détient les deuxièmes réserves au monde et parce qu'il faut du nickel en quantité pour fabriquer les batteries des voitures électriques. Mais aujourd’hui, l’une des usines de raffinage est à l’arrêt et les deux autres au ralenti.

    Le nickel calédonien trop cher à produire

    Le coût de la main-d’œuvre et de l’énergie est prohibitif face à la concurrence féroce de l’Indonésie. Le géant du secteur qui a inondé le marché en 2023. Glencore cherche un repreneur pour l’usine du nord à Koniambo, qui risque de fermer dès le mois d'août. Eramet, l’opérateur historique à Nouméa, avec sa filiale SLN, maintient le site grâce aux crédits consentis par l’État. Au-delà des difficultés conjoncturelles et bien réelles, les opérateurs sont surtout lassés, déroutés par l’absence de consensus politique sur la gestion de la filière.

    Une gestion politique paralysante

    Le métal a, certes, été un moteur de la croissance et une aubaine pour les rentrées fiscales de l'archipel, mais aussi un puissant facteur d’inégalités en faisant grimper le coût de la vie sur l’ensemble du territoire alors que la manne minière a longtemps profité aux seuls habitants de la capitale Nouméa.

    Dans le cadre des accords de Matignon puis de Nouméa, les indépendantistes obtiennent un rééquilibrage de cette rente minière avec la construction de l’usine de Koniambo au nord et sa gestion par la province qu’ils dirigent. Elle verra enfin le jour en 2013. Mais depuis, les décisions stratégiques sont souvent parasitées, voire empêchées par des polémiques politiciennes.

    La pauvreté et les inégalités, le revers de la médaille

    Dernière en date : le pacte nickel proposé par Bercy pour réduire les coûts de production a capoté, faute d’accord politique. L’État proposait une enveloppe de 200 millions d’euros à condition que les collectivités ajoutent 66 millions d’euros. C’est l’un des motifs qui les a fait reculer alors que ce coup de pouce est une nécessité absolue pour retrouver de la compétitivité. Il faut dire que leurs finances sont exsangues, avec un taux d’endettement de 150% par rapport aux recettes réelles.

    Même si le tourisme est quasiment revenu au niveau d’avant le Covid, la Nouvelle-Calédonie panse encore les plaies causées par la pandémie et l'inflation. Le coût de la vie demeure exorbitant, 30% plus élevé qu'en métropole. Vingt pour cent de la population vit en dessous du seuil de pauvreté.

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  • Vladimir Poutine est en Chine pour une visite officielle de deux jours. Depuis la mise en place des sanctions, suite à la guerre contre l'Ukraine, la Chine est devenue un partenaire commercial indispensable à la Russie.

    La Chine remplace désormais l’Europe dans la balance commerciale de la Russie. L’empire du milieu est devenu son premier fournisseur et son premier client pour le pétrole et le gaz. Le commerce entre les deux pays a bondi de 25% entre 2022 - l’année du début de la guerre russe contre l’Ukraine, et 2023.

    Les semi-conducteurs, les téléphones, les machines à laver ou les voitures fabriquées en Chine inondent le marché russe, parfois au détriment des champions locaux. Avtovaz, le constructeur des Lada, est le premier à s’en plaindre. Mais aussi au grand bénéfice de l’industrie russe de la défense. Elle tourne à plein régime grâce aux composants fabriqués en Chine ou transitant par la Chine en provenance de pays tiers.

    Dépendance russe

    C’est quasiment exclusivement en rouble, et surtout en yuan, que sont réglées les transactions, à cause des sanctions qui privent la Russie de l’accès au dollar. Pour la monnaie comme pour le volume des échanges, la Chine est le grand bénéficiaire. La Chine représente le tiers du commerce russe mais la Russie seulement 4% du commerce chinois. Vladimir Poutine vient donc à Pékin pour avoir des assurances sur la durée.

    Dans cette relation asymétrique, Moscou propose, Pékin dispose. La Chine a obtenu par exemple un rabais de cinq dollars par baril sur le pétrole russe. Autre exemple pour le commerce du gaz : la Chine prend son temps pour les travaux du gazoduc reliant les deux voisins. Elle a déjà d'autres fournisseurs de gaz tandis que pour Gazprom qui a perdu son principal client européen, le débouché chinois est vital. Vladimir Poutine espère bien faire avancer ce dossier pendant sa visite. Il souhaite aussi plus d'échanges en monnaie locale, au moment où la Chine redouble de prudence pour éviter les sanctions américaines contre ses banques.

    Des intérêts divergents

    « La Chine est prête à renforcer ses liens avec la Russie », a assuré Xi Jinping au président russe. Les deux partenaires ont pourtant des intérêts commerciaux, économiques divergents. Avoir une relation commerciale totalement déconnectée du dollar et du camp occidental, est un gain économique et géopolitique pour Moscou. Isolée par sa guerre contre l’Ukraine, la Russie rêve de construire un monde parallèle à celui du bloc occidental.

    La Chine a en revanche encore besoin des marchés européens et américains. Son commerce avec la Russie pèse 240 milliards de dollars ; avec les États-Unis, c’est plus du double : 660 milliards ; et avec l’Europe : 800 milliards de dollars. Pékin ne veut certainement pas d’un découplage hermétique. Pour imposer son ordre mondial, la Chine évite la confrontation et cultive au contraire la carte commerciale. Elle se targue d’être le premier fournisseur de 120 pays. Une position privilégiée pour gagner en influence, au détriment de la première puissance mondiale.

  • L’Australie, championne mondiale du charbon et du gaz, va-t-elle devenir une grande puissance des énergies renouvelables ? C’est en tout cas l’objectif affiché par le gouvernement. Pour y parvenir, il a promis 23 milliards de dollars américains pour développer les énergies vertes, ce mardi 14 mai.

    Vingt-trois milliards de dollars américains pour développer les minerais critiques, l’hydrogène vert et le solaire, c’est un coup de pouce fiscal en format XXL que le gouvernement travailliste d'Anthony Albanese a mis sur la table dans son budget 2024-2025. Les plus grosses dépenses de toute l'histoire du pays en faveur des énergies bas carbone. Cet effort budgétaire confirme le tournant voulu par le gouvernement et déjà amorcé le mois dernier : deux mines de charbon ont été converties en centre touristique pour l'une et en usine photovoltaïque pour l'autre.

    Le pays-continent s’est engagé à atteindre la neutralité carbone en 2050. Et il met le paquet pour verdir sa production électrique. En dix ans, les volumes en solaire et en éolien ont doublé. Le renouvelable représente près de 40% de la consommation électrique, mais le charbon et le gaz encore 60%. Ces deux hydrocarbures reculent dans le mix énergétique mais restent cruciaux dans le commerce extérieur. Avec le fer, ce sont les premiers produits d’exportations. Soixante-quinze pour cent du charbon, 90% du gaz naturel liquéfié (GNL) partent à l’étranger.

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    À cause de ces exportations, l'Australie est classée parmi les plus gros émetteurs de gaz à effet de serre. Avec quinze tonnes de CO2 émises par habitant, c'est le pays le plus polluant après le Qatar et l’Arabie saoudite. Bien plus que les grandes puissances énergétiques que sont les États-Unis et la Russie. Ces ressources minières jouent un rôle disproportionné dans son économie.

    Double standard

    Un rôle auquel l’Australie n’est pas prête à renoncer. En avril, le gouvernement a prévenu : après 2050, l’Australie continuera à exporter du gaz naturel liquéfié (GNL), même si elle a atteint la neutralité carbone sur son territoire. Le gouvernement encourage même les investisseurs à développer l’exploitation de nouveaux gisements.

    Ce double standard, neutralité carbone à l'intérieur, pollueur à l'extérieur, n'est pas l'apanage de l'Australie. On retrouve la même philosophie en Norvège. Le champion de la voiture électrique est aussi un producteur de pétrole et de gaz prospère qui développe au maximum les hydrocarbures.

    Une industrie verte pour remplacer celle des hydrocarbures

    La plus grande transformation de l’économie depuis la révolution industrielle promise par le gouvernement australien est motivée par les engagements climatiques et des nécessités économiques. L’Australie en a besoin pour trouver de nouvelles sources de revenus, et pour donner un travail aux 50 000 personnes employées dans le charbon et le gaz, essentiellement des hommes faiblement qualifiés.

    Les métaux verts, les panneaux solaires et l’hydrogène vert sont des débouchés potentiellement crédibles, car les besoins mondiaux ne vont cesser d’augmenter. Ce projet développé sous la bannière « Un avenir made in Australia » est aussi un pari osé, face à la Chine qui a réussi à écraser la concurrence dans quasiment le monde entier.

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  • Ce lundi 13 mai, la Chine a donné le coup d’envoi à son plan de soutien à l’économie, en panne depuis la fin de la pandémie de Covid-19. À partir du 17 mai, l'État lance un méga emprunt à hauteur de mille milliards de yuans. Ce plan était espéré de longue date par les acteurs économiques. Sera-t-il à la hauteur de leurs attentes ?

    Mille milliards de yuans, c’est environ 140 milliards de dollars. Un montant considérable de dette publique qui sera levé en plusieurs fois, jusqu'en novembre, avec des maturités très longues, de vingt à cinquante ans. L’État souhaite financer des secteurs critiques, comme l’énergie ou la sécurité alimentaire, pour redonner de l’élan à la croissance.

    Le Covid-19 puis la crise immobilière ont littéralement gelé les projets d’investissement des entreprises et des ménages. Actuellement, le seul secteur bien portant de l’économie chinoise est celui des industries exportatrices. Et cela pourrait très vite se dégrader si les États-Unis et l’Europe prennent des mesures pour protéger leurs marchés.

    Une émission spéciale réservée à des situations critiques

    Une émission de dette sur un montant aussi important, c'est un évènement assez rare. L'État chinois n'y a recours qu'avec parcimonie, pour la quatrième fois seulement en vingt-cinq ans. Cette méga obligation est dans le même esprit que celle qui a été lancée en 2020 pendant le Covid.

    À la fin des années 1990, Pékin a recouru à un grand emprunt pour recapitaliser ses banques, et en 2007 pour abonder son fonds souverain. Cette fois, Pékin escompte un effet sur l’ensemble de l’économie. Ces 140 milliards de dollars pourraient apporter un point de croissance supplémentaire à la Chine et lui permettre d'atteindre son objectif officiel fixé à 5% pour 2024.

    Les infrastructures plutôt que la consommation

    Mais pas sûr que l'objectif réel soit vraiment atteint. Trouver de l'argent frais pour investir dans les infrastructures, c'est bon en termes macro-économiques mais pas forcément pour regagner la confiance des opérateurs, entreprises et ménages. Aujourd’hui le loyer de l'argent est relativement bas en Chine, en dessous de 3%, ce n’est pas pour autant que les particuliers ont envie d’acheter un appartement ou que les entreprises projettent de s’agrandir.

    En avril, l’encourt des emprunts bancaires a chuté drastiquement, tombant à son plus faible niveau depuis 2005. Autre bémol : les fonds levés l’an dernier par l’État n’ont pas encore été totalement réinvestis. Cet argent frais ne sera donc pas forcément réinjecté rapidement dans l'économie chinoise.

    La Banque centrale à la manœuvre

    Pour assurer le succès de l'opération, la Banque centrale chinoise devrait rapidement donner du lest aux banques en abaissant le niveau de leurs réserves obligatoires. Elle pourrait aussi diminuer les taux d'intérêts pour dynamiser le marché. La Banque centrale, qui n'a pas l'habitude d'intervenir sur le marché de la dette, pourrait même ultérieurement racheter ces bons du trésor sur le marché secondaire.

    Ce méga emprunt serait donc aussi un préambule à des mesures de relance monétaire, d'une tout autre ampleur. Sur le modèle de l'assouplissement monétaire pratiqué par la Réserve fédérale. Une thérapie grand format pour régénérer une économie à bout de souffle après trente ans de croissance forcenée.

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  • L’économie de guerre russe prive de main-d’œuvre une industrie pétrolière cruciale à l'économie du pays. L'armée et les fabricants d'armes sont en concurrence avec le secteur des hydrocarbures pour attirer les hommes en âge de travailler, alors que de nombreux hommes ont quitté le pays, pour se rendre sur le front ou partir à l'étranger.

    Depuis le début du conflit en Ukraine, 150 000 soldats russes sont morts sur le front, selon le ministre français des Affaires étrangères, Stéphane Séjourné, interrogé dans l'édition européenne du journal russe indépendant Novaïa Gazeta le 3 mai. De son côté, le ministère britannique de la Défense parle de plus de 450 000 soldats russes tués ou blessés depuis le début de l'offensive russe en février 2022. Un drame qui ne touche pas que les familles ; le départ des soldats au front prive la Russie d'une main d'œuvre précieuse.

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    Le secteur pétrolier et gazier manque cette année d'environ 40 000 employés qualifiés ou non, selon les estimations de Kasatkin Consulting, un cabinet basé à Moscou. En tout, le nombre de travailleurs nécessaires pour faire tourner le secteur a plus que triplé en sept ans, selon les analyses de Bloomberg. Or, les hydrocarbures représentent 27 % du PIB russe et 57 % des exportations du pays. Un enjeu d'autant plus important, que l’industrie pétrolière et gazière contribue grandement à combler le besoin de liquidités de la Russie pour poursuivre son offensive en Ukraine.

    Malgré les sanctions internationales, les revenus du secteur devraient encore augmenter cette année (l'an dernier, ils étaient de 88 milliards d'euros) et l'industrie des hydrocarbures reste l’un des employeurs qui offrent les meilleurs salaires en Russie. Au moins des deux tiers supérieurs à la moyenne nationale depuis 2017, selon les calculs de Bloomberg basés sur les données du Service fédéral des statistiques.

    Mais, rien n’y fait, ces salaires élevés ne semblent pas compenser ceux offerts par l’armée russe

    Prime d'engagement pour les soldats russes

    En plus d’une augmentation générale de son salaire de plus de 10 % depuis octobre dernier, un soldat russe sous contrat se voit en effet offrir un bonus pouvant atteindre 1 million de roubles, soit plus de 10 000 euros, auquel il faut ajouter une prime d’adhésion forfaitaire de 195 000 roubles soit près de 2000 euros… ce qui n'est pas négligeable pour une partie de la population qui vit sous le seuil de pauvreté.

    Il y a aussi de nombreux débouchés et des postes bien payés chez les fabricants militaires. La demande de chars, de véhicules blindés et d’armes a grimpé en flèche depuis le début de l’invasion russe et les usines d’armement recrutent à tour de bras. L'année dernière, l'entreprise nationale de défense russe Rostec a augmenté les salaires de 17,2 % en moyenne. Et la Russie a abaissé l’âge légal pour travailler à 14 ans.

    Des repas chauds trois fois par jour

    De leur côté, les sociétés pétrolières et gazières russes rivalisent d'imagination pour attirer des employés avec des salaires élevés, mais aussi des avantages en nature. Un travailleur de terrain effectuant des missions mensuelles quelque part en Sibérie ou dans l'Arctique peut s'attendre à « des repas chauds trois fois par jour » et à des contrôles médicaux réguliers couverts par l'employeur, selon les offres d'emploi sur hh.ru.

    Mais le flux de main d’œuvre venant de l’étranger s'est, lui aussi, tarit : en 2023, l'afflux net officiel de migrants étrangers dans le pays s'est élevé à près de 110 000 personnes, à peine un quart du niveau de 2021. Autre phénomène, depuis le début du conflit en Ukraine, des centaines de milliers de Russes ont quitté le pays, ce qui amène le président Poutine à déclarer que le pays va faire face à « un déficit de cadres et de qualifications » dans les prochaines années.

    Maintenir une production rentable

    Pour autant, le secteur pétrolier et gazier a jusqu’à présent très bien résisté, malgré les sanctions internationales, grâce à un report quasi total des exportations vers d'autres pays comme la Chine et l'Inde, donnant à Moscou les liquidités nécessaires pour continuer à mener son offensive. Selon l'Agence internationale de l'énergie (AIE), l'embargo imposé par l'Union européenne n'a eu aucun impact sur le volume des exportations russes d'hydrocarbures.

    Mais la pénurie de main d'œuvre soulève la question de savoir si l’industrie pétrolière et gazière Russe pourra maintenir ses performances à long terme. « L'accès restreint aux services pétroliers de haute technologie occidentaux crée un risque pour le maintien et l'augmentation d'une production et d'un raffinage rentables du pétrole et du gaz », selon Sofia Mangileva, analyste chez Yakov & Partners à Moscou et citée par Bloomberg. Car il ne s’agit plus seulement de faire fonctionner les équipements, mais aussi de développer la technologie de production nécessaire pour rester compétitif.

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  • Le rétablissement des finances du Ghana, toujours en défaut de paiement, est désormais suspendu à un jugement de la Cour suprême du pays. Elle a commencé à examiner la loi réprimant l'homosexualité votée en février. Si cette loi est jugée conforme à la Constitution, elle sera adoptée et le Ghana pourrait alors perdre le soutien de la Banque Mondiale.

    Les auditions prévues hier, mercredi 8 mai, devaient être retransmises en direct à la télévision. C’est dire à quel point ce débat passionne les Ghanéens à quelques mois de l'élection présidentielle programmée en décembre.

    Les juges ont finalement ajourné leurs travaux en demandant à l’un des plaignants, un journaliste qui conteste la loi, de réécrire sa copie, trop injurieuse, pas assez technique selon eux. Cette loi est très sévère : elle prévoit des peines pouvant aller jusqu'à cinq ans de prison contre les LGBTQ, et de la prison ferme également contre les proches qui ne dénonceraient pas ce choix sexuel.

    La loi a été votée sans opposition par les principaux partis, mais le président attend l'avis de la Cour suprême pour la promulguer. Nana Akufo Ado redouble de prudence par crainte de la réaction de la Banque mondiale.

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    Les exigences de la Banque mondiale

    Accra n'a toujours pas résolu sa crise de la dette et a donc un besoin urgent de la Banque mondiale. Or cette loi anti-gay n'est pas compatible avec les standards exigés par le bailleur. La Banque mondiale a déjà suspendu deux fois ses versements après l’adoption de textes condamnant l’homosexualité en Ouganda. En 2014, le gouvernement fait très vite machine arrière. Mais en 2023, le président Museveni approuve la nouvelle loi pénalisant l'homosexualité et refuse de reculer sous la pression de la banque.

    Le plan B

    La Banque mondiale pourrait annuler le prêt de 3,8 milliards de dollars accordé au Ghana. Le FMI pourrait suivre. Il assure un autre financement de trois milliards de dollars. Enfin, Accra redoute la réaction de ses partenaires européens. L’Allemagne a déjà fait savoir qu’elle réprouvait cette loi. Au moment du vote de la loi, le ministre ghanéen des Finances avait averti les parlementaires du risque couru, leur conseillant de chercher des financements alternatifs auprès des pays arabes ou de la Chine. Précisément ce que redoute la banque mondiale

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    La Banque mondiale face à un dilemme

    Soit elle transige sur ses valeurs pour assurer sa mission d’assistance aux États en détresse, soit elle reste fidèle à ses principes, mais risque alors d'être contournée, dépassée par des puissances du Sud global. La position qu'elle adoptera au Ghana sera attentivement suivie sur tout le continent africain, au moment où les États africains ont du mal à accéder au financement ; au moment aussi où les gouvernants comme les populations sont de plus en plus excédés par les conditions imposées par les bailleurs occidentaux, parfois en opposition frontale avec leurs valeurs. Une majorité de pays africains, une trentaine, interdisent l'homosexualité. Certains, comme le Niger ou le Kenya, envisagent même de renforcer la répression anti LGBTQ.

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  • Le président Xi Jinping est attendu ce mercredi 8 mai au soir en Hongrie, la troisième étape de sa tournée européenne. Un pays où la Chine est bienvenue, notamment pour investir dans le véhicule électrique.

    La Hongrie est aujourd’hui le troisième producteur mondial de batteries. Très loin derrière la Chine qui fabrique les trois quarts des batteries, mais tout près du numéro deux, les États-Unis qui fournissent 6% de la demande. Un numéro deux que Viktor Orban rêve de dépasser d'ici à 2030. Mégalomanie pour les uns, vrai plan de développement pour les autres, sa politique industrielle est constante.

    Les grandes marques automobiles allemandes, coréennes, japonaises sont déjà installées en Hongrie, mais c’est la Chine qui fait la différence avec des investissements record dans le véhicule électrique. Le numéro un mondial des batteries, le chinois CATL a investi plus de sept milliards de dollars pour construire une giga factory. Le plus grand investissement étranger de tous les temps pour la Hongrie.

    La ruée des acteurs chinois

    Beaucoup d'autres acteurs chinois ont des projets en cours. Le constructeur BYD a une usine en chantier. Et on murmure qu’un nouveau méga-investissement pourrait être annoncé pendant la visite de Xi Jinping. Par Great Wall Motor, un autre poids lourd chinois du e-véhicule. Il aurait dans ses cartons un projet d’usine proche de la ville de Pecs où doit se rendre le dirigeant chinois.

    Pour la Chine, de plus en plus snobée par les Vingt-Sept, l’accueil enthousiaste que lui réserve la Hongrie est une aubaine politique, mais aussi économique. Elle trouve sur place une main-d’œuvre bon marché et un gouvernement peu regardant sur les normes environnementales et très accommodant sur le plan fiscal avec les ristournes généreuses accordées aux investisseurs chinois. Ses constructeurs ont désormais une partie de leurs ateliers installés au cœur même de l’Union européenne, un marché vital pour leur industrie.

    Pari gagnant pour la Hongrie ?

    L’automobile représente environ 15% du PIB hongrois en intégrant les équipementiers. Développer cette industrie avec les capitaux chinois lui permet d’accélérer la cadence. Mais à quel prix pour l’environnement, s’interrogent les sceptiques. Des accidents parfois mortels sont déjà survenus à cause des déchets toxiques émis par ces nouvelles usines.

    Dans le village où est installée la giga factory de CATL, la population s’inquiète aussi de la pollution et de la surconsommation d’eau de l’usine qui pourrait épuiser les faibles ressources aquifères de la région. D’après un sondage réalisé par un institut américain, 52% de la population hongroise se déclarait hostile à la présence chinoise en 2022, 15% de plus qu’il y a cinq ans. Mais il y a toujours une majorité de Hongrois qui accordent leur confiance à Viktor Orban, le meilleur allié européen de la Chine. La Hongrie de Viktor Orban se définit elle-même comme la tête de pont de la Chine en Europe. À des années-lumière de la confrontation et de l'autonomie stratégique de l'Europe prônée par la France où Xi Jinping a commencé sa tournée.

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  • Au moment où on assiste en Afrique à la recrudescence des coups d’État, la suspension de l’aide publique au développement est-elle encore employée pour faire pression sur les putschistes ? C’est la question que s’est posée la Coface. La réponse varie fortement d'une époque à l'autre.

    Les chercheurs de la Compagnie française d'assurance pour le commerce extérieur (Coface) sont partis d’un constat largement partagé : partout dans le monde, le risque politique augmente en flèche. Le Fonds monétaire international (FMI) considère qu’avec le risque climatique c’est aujourd’hui l’un des freins les plus puissants à la reprise de l’économie. La guerre en Ukraine, la guerre à Gaza, en témoignent.

    En Afrique, ce risque se manifeste surtout par la recrudescence des coups d’État. Il y a eu le Niger et le Gabon en 2023, le Burkina, le Mali ou encore la Guinée les années précédentes. Cette prise du pouvoir par la force n'est pas un phénomène vraiment nouveau sur le continent africain. C'est même très répandu depuis les indépendances. 44% des coups d'État répertoriés dans le monde depuis 1950 se sont déroulés en Afrique, nous indique la Coface. Dans cette région où l’aide publique au développement (APD) joue encore un rôle économique déterminant, les auteurs de l'étude ont regardé comment évoluent les flux d’APD avant et après les coups d’État en utilisant les chiffres des 30 pays donateurs suivis par l'OCDE.

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    L’équilibre de la guerre froide

    Pendant la guerre froide, la suspension de l'aide est loin d'être une sanction automatique. Entre 1950 et 1989, l’année de la chute du mur de Berlin, l'aide diminue seulement une fois sur deux après un coup d'État. Dans un monde dominé par deux camps antagonistes, l’Occident d’un côté, le bloc soviétique de l’autre, les donateurs veillent à ne pas compromettre leur influence en coupant brutalement le robinet. Ils mesurent donc avec parcimonie la suspension de l’aide publique.

    En revanche, à partir de 1990, les pays occidentaux n'ont plus les mêmes préventions. Entre 1990 et 2010, l'aide est suspendue dans 76% des cas l'année suivant un coup d’État. La Gambie et la Côte d'Ivoire en feront les frais. C'est vrai aussi que c'est une période où la prise du pouvoir par la force diminue nettement en Afrique. L’heure est à la démocratisation des régimes. Et les organisations régionales africaines, comme l'Union africaine ou la Cédéao se dotent, elles aussi, d’instruments pour sanctionner le recul de l'État de droit et de la bonne gouvernance. En revanche, depuis 2011, les donateurs hésitent à employer cette arme.

    La suspension de l’APD moins fréquente

    Entre 2011 et 2021, 67% des coups d’État ont été suivis par la suspension de l’aide publique au développement. Pour les auteurs de l’étude, c'est le grand retour « des intérêts géostratégiques dans un monde multipolaire ». Aujourd'hui, sur le continent africain, les Occidentaux ne sont plus les seuls donateurs. Ils sont en concurrence avec la Russie, la Chine, mais aussi les pays du Golfe ou d’Asie. Un contexte qui les invite à se montrer beaucoup plus prudent avec les putschistes.

  • Après cinq ans d’absence, Xi Jinping est de retour en Europe avec une première étape en France où il est question, ce lundi 6 mai, des pratiques commerciales déloyales de la Chine. Le président Macron entend exiger la réciprocité dans les affaires. L’Europe se réveille enfin face à la Chine ?

    Longtemps la Chine a été perçue en Europe comme une nation industrielle secondaire sur le plan technologique. Aujourd’hui, les Vingt-Sept réalisent que les entreprises chinoises peuvent aussi rivaliser dans les domaines d’excellence de l’industrie du Vieux Continent. Après avoir quasiment éliminé la filière européenne du photovoltaïque, les Chinois sont en mesure de rééditer la manœuvre dans le véhicule électrique.

    Biberonnée aux subventions, l’industrie chinoise produit à tout-va des véhicules qu’elle exporte en cassant les prix. Les Chinois ont raflé 20% du marché européen en deux ans. De quoi inquiéter les constructeurs européens. Pour faire barrage à cette concurrence féroce, perçue comme une menace existentielle pour l'Europe, selon les mots du président Macron, l'Europe ne se contente plus de donner de la voix, elle sort désormais l'artillerie juridique chaque qu'elle s'estime en danger.

    Les nouvelles armes juridiques de l’Europe

    Quatre nouvelles procédures ont été lancées contre la Chine depuis le début de l'année. Sur la base de la nouvelle réglementation sur les subventions étrangères introduite l'été dernier. La Commission européenne a dénoncé ces pratiques dans la voiture électrique, puis dans la construction ferroviaire, l’éolien et le photovoltaïque. La semaine dernière, Bruxelles a aussi accusé la Chine d’exclure les entreprises européennes du marché chinois des équipements médicaux et menace de bannir les Chinois des appels d'offres européens en représailles. Une première pour l'Europe.

    Autre intervention spectaculaire de la Commission : des perquisitions ont été effectuées il y a une dizaine de jours dans les bureaux néerlandais et polonais de Nuctech, l'entreprise chinoise ultra-dominante dans les aéroports européens pour le scan des bagages. Une entreprise qui a aussi les moyens d'aspirer des données, elle est interdite en Lituanie et aux États-Unis. Citons enfin l'avertissement adressé à Shein. La plate-forme chinoise de « fast fashion » est désormais placée sur le même plan que les géants américains de l’internet et s’expose à des amendes sévères si elle ne respecte pas le règlement européen sur les services numériques.

    Les représailles chinoises contre le cognac français

    La Chine a déjà pris des mesures de représailles en lançant une enquête sur le cognac français. C'est de bonne guerre. La France est perçue par Pékin, et à raison, comme le pays moteur dans ce changement de pied de l'Europe. Le président Macron a réussi à faire venir, ce lundi matin à Paris, la présidente de la Commission Ursula von der Leyen pour cette session consacrée aux différends commerciaux.

    En revanche, le chancelier allemand a décliné. Emmanuel Macron reconnaît que tous les Européens ne partagent pas sa vision. « Certains pays, a-t-il dit à nos confrères de la Tribune, voient toujours la Chine comme un marché de débouchés », une remarque qui s'applique bien sûr à l'Allemagne. Xi Jinping peut évidemment jouer sur les divisions de l'Europe, c'est ce qu'il a fait jusqu'à maintenant. Il peut aussi choisir de ménager l'Europe, au moment où la croissance de la Chine patine et où sa relation avec les États-Unis se dégrade.

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